Echo des Plaines : Chapitre VII ▬ Le Retour d'Inasmir


 
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 E&T ♣ Un éclair puis la nuit (...) ne te verrai-je plus que dans l'éternité ?

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MessageSujet: E&T ♣ Un éclair puis la nuit (...) ne te verrai-je plus que dans l'éternité ?   E&T ♣ Un éclair puis la nuit (...) ne te verrai-je plus que dans l'éternité ? EmptyMer 08 Déc 2010, 20:14


Car j'ignore où tu fuis, tu ne sais où je vais.

Rien ni personne ne pouvait lui dicter sa conduire, même cet inconnu – certes séduisant et qui l'avait tirée d'un mauvais pas – mais qu'elle soupçonnait pourtant fortement d'être d'une quelconque manière lié aux évènements. Elle n'avait elle même rien à se reprocher mais c'est pourtant bien allègrement qu'elle pensait que les choses n'arrivaient jamais par hasard, aussi, forte de cette théorie, elle assimila naturellement que le rôdeur n'était pas une blanche colombe au dessus de tout soupçon. Si elle se portait elle même garante de son innocence pour le meurtre dont on les accusait tous deux, elle était tout autant intimement persuadée qu'il n'avait pas la conscience tranquille.
Quels crimes avait-il pu commettre tout au long de sa vie ? C'était la question qui préoccupait Elvire tandis qu'elle longeait le plus discrètement possible la route qui la rapprochait de la ville. Peu habituée à faire montre de prudence, elle n'était tout de même pas suffisamment inconsciente pour ne pas prendre d'inutiles risques. Ce n'était jamais bon de suivre une route de nuit, ça l'était encore moins pour une jeune femme, mal équipée qui plus est. Elle n'était pas en fuite depuis bien longtemps, à peine quelques jours, mais sa robe partait déjà en lambeaux et Elvire ne cessait de s'en lamenter. Elle s'en voulait de ne pas avoir sur elle une tenue de voyageuse mais refusait de s'en prendre à elle même : ce n'était, après tout, pas de sa faute si elle avait dû fuir comme un malfrat, laissant toutes les affaires qui auraient pu lui servir en de telles occasions au fin fond d'un coffre chez ses parents.
Récupérer des affaires, ce n'était pas une mauvaise idée et, cette pensée fit naitre un sourire sur ses lèvres, si d'aventure elle devait rendre des comptes au rôdeur pour cette promenade nocturne improvisée, elle pourrait toujours s'en prévaloir. Évidemment, ce n'était pas ça qui l'avait poussée à revenir sur ses pas et elle-même ne savait pas s'il existait une véritable raison à cette soudaine impulsion, si ce n'est un désir violent de prouver à son compagnon que, bien qu'ils soient tous deux dans la galère jusqu'au cou, elle n'irait jamais ailleurs que là où elle le décidait.

Elle avait délibérément attendu qu'il s'endorme pour agir. Dès lors, elle avait rassemblé ses maigres bagages dans un coin, bien décidée à revenir les récupérer avant le lever du soleil et ainsi faire croire au rôdeur qu'elle avait dormi à ses côtés. Plus tard, elle lui raconterait sa manœuvre et, en l'imaginant, la jeune femme se délectait déjà de la tête qu'il tirerait. Oui, elle lui en ferait voir de toutes les couleurs.

(...)

« Qui est-là ? (…) Mademoiselle, arrêtez-vous. »

Elvire frissonna et la main froide et vigoureuse du soldat posée sur son bras n'y était pour rien, sa lance braquée sur sa poitrine non plus. Ce qui faisait frémir la jeune fille, c'était cette silhouette élancée qui, au milieu de la nuit, se profilait sous la pâle lumière de la lune. La sentinelle ne l'avait toujours pas vue, pourtant, l'ombre se rapprochait de plus en plus et, telle la fatalité incarnée, elle ne semblait pas marcher vers eux, mais simplement venir à eux, approcher. Voler, peut-être ? Mais elle n'avait pas d'ailes. Sans doute, flottait-elle à quelques centimètres du sol.
Brusquement, la pauvre prisonnière comprit. Ce n'était ni la fatalité, ni un fantôme qui s'approchait si dangereusement d'elle, mais bien pire : une Inquisitrice. Tous les récits et histoires qu'elle avait pu recueillir sur ces étonnantes personnes l'avaient confortée dans la crainte et ils lui revinrent en mémoire à la façon d'un seau d'eau glacée versé sur sa tête. Et bien qu'elle n'en ait jamais rencontré, elle était certaine qu'il ne pouvait s'agir que d'une Inquisitrice. L'obscurité l'empêchait de bien distinguer les contours de son visage mais sa robe, sa démarche, calme et assurée, et son regard transperçant la nuit parlaient d'eux-mêmes.

Distraite, Elvire fit à peine attention aux doigts de la sentinelle qui glissèrent de son poignet. Elle était trop fascinée par la jeune femme qui s'approchait d'elle et, s'il n'avait pas crié tout en relâchant sa prise, elle n'aurait même pas eu la présence d'esprit de s'enfuir. Heureusement pour elle, ses réflexes lui revinrent aussitôt et elle oublia l'Inquisitrice l'espace d'un instant. Seulement quelques secondes, secondes suffisantes pour comprendre que le danger imminent qui la guettait était bien plus redoutable qu'un simple soldat faisant sa ronde ou un confesseur. Il les tuerait tous les trois sans bavure et elle n'avait nulle de finir dépecée comme un vulgaire morceau de chair fraiche. Une créature des ténèbres venait juste de traverser le ciel, créant une ombre contrastant avec la lune, blanche et claire, qui profita à la jeune fille. Sans un regard derrière elle, elle fondit aussi vite qu'elle le put dans une mince ruelle dépourvue d'éclairage et resta tapie là, immobile, osant à peine respirer. Les secondes lui parurent durer des heures mais, dès qu'elle jugea la voie dégagée, elle se releva et, bien qu'elle mourrait d'envie de s'enfuir à toute jambe, Elvire se contenta pourtant de glisser le long du mur. Son cœur tambourinait vigoureusement dans sa poitrine et la malheureuse fugitive comprit, quoiqu'un peu tardivement, son erreur : Accolon avait raison. Elle n'aurait jamais dû remettre les pieds en ville.
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MessageSujet: Re: E&T ♣ Un éclair puis la nuit (...) ne te verrai-je plus que dans l'éternité ?   E&T ♣ Un éclair puis la nuit (...) ne te verrai-je plus que dans l'éternité ? EmptySam 11 Déc 2010, 21:22

    La Grande Déesse Eydis devait aimer les farces. Sinon, comment expliquer tout ce qui va suivre ? Teresa avait abandonné Say’l devant une taverne à l’allure peu respectable, lui enjoignant d’aller ingurgiter autant d’alcool qu’il le désirait. Elle lui avait même glissé une petite bourse bien remplie, son salaire, pour qu’il lui fiche une paix royale jusqu’à ce qu’elle revienne. Qu’il perde son argent en boissons ou en femmes ne la dérangeaient pas ; il demeurait loyal et disponible, c’était tout ce qui importait. Tout ce qui faisait de lui un mercenaire moins douteux que les autres. La jeune femme évita aisément les petites flaques d’eau de pluie qui s’étaient formées suite à l’averse. Elle s’arrêta devant l’une d’elles, plus grosse, pour examiner d’un œil critique sa tenue. Sombre, élégante. Sa silhouette dessinée par la combinaison de cuir noire se discernait à peine sous la large cape de fourrure fauve. L’Inquisitrice rejeta la tête en arrière, l’esquisse d’un sourire ravi ourlant ses lèvres, et se remit en route. Sa longue chevelure brune tressautait à chacun de ses pas, tandis qu’elle s’approchait d’une ruelle peu fréquentée sensée la mener au quartier d’Unigol. Partout sur son chemin, les regards se tournaient : que voulaient-ils, ces badauds ? Reconnaissaient-ils l’aura d’une Confidente ? Probable. Percevait l’éclat du respect dans leurs prunelles, elle acquiesça mentalement : ils savaient qui elle était. Au moins, ici, les personnes qui la craignaient étaient rares. Mis à part les coupables, tous « appréciaient » les Inquisitrices, tout du moins plus pour leur utilité que pour leur nature. Teresa tendit l’oreille en saisissant des brides de conversations.

    « Quelqu’un est mort… »
    « … le coupable ? »
    « C’est une femme ! … »
    « … idiot de penser ça… »
    « Pourtant, les gardes la recherchent… »
    « … Inquisitrices ? »
    « Non, pas encore. »

    Elle pinça les lèvres. D’après ce qu’elle avait pu comprendre, ses sœurs allaient bientôt devoir juger quelqu’un. Déterminer si, oui ou non, elle était bien coupable de ce meurtre dont on l’accusait. La jeune femme s’enfonça dans la pénombre, les traits de son visage disparaissant peu à peu, faisant d’elle une silhouette inconnue parmi tant d’autres. Teresa aimait passer inaperçue. N’être qu’une ombre sur laquelle les regards glissaient sans s’arrêter. Ne pas être reconnue, ne pas ressentir le poids de sa nature sur ses épaules tel un fardeau. Dès que les gens savaient qu’ils avaient affaire à une Inquisitrice, leur attitude changeait : que ce soit la façon qu’ils avaient de se tenir, l’éclat dans leurs yeux, un frémissement léger qui ondulait sur leur visage… Dès qu’ils savaient, ils n’étaient plus eux-mêmes. Etait-ce si étrange que de ne pas vouloir provoquer le moindre sentiment chez autrui ? La Confidente s’interrompit, coupant le flot incessant de ses pensées, et concentra son regard sur la scène qui se déroulait devant ses yeux. Un garde venait d’appréhender une jeune femme, et cette dernière avait un air terrorisé. Teresa fronça des sourcils, s’avançant vers le couple afin d’en savoir plus, et releva le regard à temps pour apercevoir le contour d’une créature infernale sur le dessin de la Lune. Sa première réaction fut de se figer, de rechercher fébrilement la poignée de sa dague et de reculer. Elle s’arrêta après avoir fait un pas en arrière, manquant de se faire bousculer par le garde qui passait en courant à côté d’elle – apparemment pour suivre la chose. Oubliée, la fille qu’il venait d’arrêter. Mais l’Inquisitrice, elle, avait bien vite retrouvé sa trace. Disparaissant au coin de la ruelle, la Singulière se dissimula à sa vue.

    Resa se rapprocha de l’endroit, tirant tout de même son poignard de son fourreau, et passa la tête pour savoir si la blonde était déjà loin ou non. Seule l’éclat lunaire lui permit de distinguer la frêle silhouette de la damoiselle. La jeune femme rangea son arme en faisant quelques pas vers la fugitive, mettant en avant ses paumes désormais vides afin qu’elle comprenne qu’elle ne lui voulait aucun mal.

    « Viens avec moi, l’endroit n’est pas sûr. Je m’appelle Teresa, je veux juste te protéger… Tu as vu ce monstre, n’est-ce pas ? Alors viens, accompagne-moi au Temple et tu pourras partir dès que l’aube sera levée. Ce sera bientôt la panique, de toute façon. »

    Une proposition honnête, et qui, elle l’espérait, trouverait grâce aux yeux d’Elvire. En attendant sa réponse, elle détailla discrètement ce que la tenue de la Singulière. Une robe ayant eu de jours meilleurs, une coiffure défaite, un peu de saleté sur le visage… Lentement, le doute s’insinua en elle. Venait-elle de proposer de l’aide à une personne en fuite ? Le pire serait certainement qu’elle se trouve face à la criminelle que la garde recherche. Comment savoir si c’était elle, d’ailleurs ?

    « Tu n’as rien à te reprocher, n’est-ce pas ? Si c’est le cas, tu n’as pas à hésiter plus longtemps. »

    Pour l’instant, elle ne pouvait qu’observer Elvire en espérant ne pas être en train de commettre une erreur monumentale. Sauf si elle lui posait directement les questions qu’elle avait en tête, elle ne parviendrait pas à déterminer si cette pauvre fille était une meurtrière ou non. Néanmoins, même taraudée par le doute elle voulait encore l’aider. Avait-elle raison ? Teresa tendit sa main droite à la fugitive, et pria Eydis en silence.


Dernière édition par Teresa Hywel le Ven 07 Jan 2011, 13:45, édité 1 fois
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MessageSujet: Re: E&T ♣ Un éclair puis la nuit (...) ne te verrai-je plus que dans l'éternité ?   E&T ♣ Un éclair puis la nuit (...) ne te verrai-je plus que dans l'éternité ? EmptyVen 17 Déc 2010, 18:14

Elvire avait fini par s'arrêter pour se recroqueviller dans un coin sombre de la ruelle dans laquelle elle s'était engagée. Elle ne s'était laissée convaincre que par l'absence d'agitation et tout particulièrement de bruit, celui que font les sandales contre le sol à chaque pas de leur propriétaire.
De toute manière, elle ne comptait pas s'attarder dans la ville, il lui fallait juste s'assoir, l'espace d'un instant, afin d'y voir plus clair, de laisser retomber la peur qui lui écraser les côtes, et de trouver une solution à son problème du moment : fuir Cathairfàl.
Avait-elle déjà eu plus mauvaise idée, Elvire se le demanda – en laissant échapper un grognement – lorsqu'elle vit se dessiner les contours d'une silhouette revenant à l'assaut. Ce n'était pas le moment de s'affoler, après tout, il s'agissait peut-être d'un habitant du quartier, n'importe qui, et non, forcément, de ses poursuivants. Faible espoir qui disparût totalement lorsqu'Elvire vit briller la belle chevelure de l'Inquisitrice sous la lumière tamisée de la lune.
Elle avait bien trop peur des Inquisitrices – bien plus, en vérité, qu'une modeste sentinelle – et de ce qu'elles pouvaient lui faire pour prendre celle-ci à la légère. Fuir ? Inutile d'y penser puisqu'elle n'avait aucune chance de gagner cette course. Elle n'était ni rapide, ni endurante. Rester ? Ce n'était pas comme si elle avait vraiment le choix...
Coincée, elle se résolut finalement à examiner de plus près son interlocutrice et ne put dissimuler sa surprise lorsqu'elle s'adressa à elle avec, était-ce possible ? ce qui ressemblait à de la gentillesse.

« Viens avec moi, l’endroit n’est pas sûr. Je m’appelle Teresa, je veux juste te protéger… Tu as vu ce monstre, n’est-ce pas ? Alors viens, accompagne-moi au Temple et tu pourras partir dès que l’aube sera levée. Ce sera bientôt la panique, de toute façon. »

Elvire eût brusquement l'impression de remonter le temps, lorsqu'elle était enfant, et qu'elle s'abandonnait dans les bras de sa mère suite à une amère déception ou à un vilain chagrin. Douce et bienveillante, sa mère s'était toujours montrée d'une patience sans borne, toujours prête à cajoler son enfant qui, à cause d'une sensibilité à fleur de peau, trouvait la vie bien tortueuse et accidentée. Mais pour Elvire, tout était source d'intenses émotions et elle n'avait jamais pu contenir son affectivité. À présent, elle se trouvait en tête avec cette jeune femme, Teresa, dont le nom seul lui donnait envie de lui faire confiance. Comme par le passé, elle aurait aimé serrer la jeune femme contre elle, se blottir près de son cœur et pleurer sur son épaule, jusqu'à ce que ses soucis disparaissent. Cette méthode avait longtemps porté ses fruits, jusqu'au jour où la singulière s'était rendue compte qu'un simple geste de la main ne suffisait plus à faire disparaître ses problèmes. Ceux-ci ne se volatilisaient pas du jour au lendemain. Elle aurait bien aimé, aujourd'hui plus que jamais, que ses difficultés soient aussi futiles que celles qui la tracassaient lorsqu'elle était petite et qu'elles se dénouent toujours si naturellement. Naturellement, un mot qui n'avait plus croisé son chemin depuis un bon petit bout de temps...
Elle allait céder à son impulsion et se précipiter dans les bras de l'Inquisitrice, mais l'esquisse d'un mouvement de celle-ci lui fit reprendre conscience de la situation. Elle se ravisa, songeant qu'il s'agissait d'une inconnue, une inquisitrice de surcroît, et l'idée de trouver un quelconque refuge auprès d'elle lui parût soudainement ridicule. Teresa n'était guère plus âgée qu'elle, voire même plus jeune, et elle doutait grandement qu'elle puisse la réconforter à la manière d'une mère ou même d'une grande sœur.

« Tu n’as rien à te reprocher, n’est-ce pas ? Si c’est le cas, tu n’as pas à hésiter plus longtemps. »

Elvire rougit sobrement. Les Inquisitrices avaient-elles le pouvoir de lire dans les pensées ? Son front se plissa et ses yeux se dérobèrent à ceux de la jeune femme.
Ce n'était pas à une question à laquelle elle voulait répondre, sans doute parce qu'elle ne savait pas elle même si elle avait une part de responsabilité dans le meurtre de son amie. Après tout, si ce n'était pas le cas, pourquoi cet affreux sentiment de culpabilité lui tiraillerait-il les tripes ? Et pourquoi n'était-elle pas capable de s'endormir sans être tourmentée, dans son sommeil, par l'image de sa défunte camarade ? Pourquoi fallait-il que son fantôme la hante si péniblement ? Elle aurait aimé se souvenir de Léonie Aronwë comme d'une jeune femme vive, belle, raffinée et espiègle, avec qui elle avait passé des moments inoubliables, mais les tous derniers instants qu'elle avait passé à ses côtés, épouvantables, le sang sur sa poitrine, ses yeux sans vie, écarquillés de surprise ou de douleur, et son visage pâle figé à jamais occupaient tout l'espace. Était-elle condamnée à toujours se souvenir de cette longue minute de souffrance au dépit des courtes années d'euphorie qui avaient égaillé son cœur durant toute son adolescence ? Elvire n'en savait rien cependant, elle savait qu'elle n'était pas prête à passer aux confidences ni à reparler de ce qui s'était passé. Avec Accolon, chaque fois qu'elle avait essayé, ne serait-ce que pour évoquer cette scène qui les avait réuni tous deux et se délester de ce qui la torturait, une boule s'était formée au fond de sa gorge et aucun son n'était sorti d'entre ses lèvres. Depuis, elle avait renoncé.
Parce qu'elle n'était pas capable d'y répondre, Elvire décida de passer la question de Teresa sous silence. Aussi, tentant sans grand succès de se façonner un visage impassible pour camoufler la vive émotion qui menaçait de la submerger, elle répondit d'un ton égal.

« Je n'irai pas au Temple. »

Un nouveau frisson traversa son échine, elle avait vaguement entendu parler d'un temple des Inquisitrices, bâti dans Unigol mais qui se soustrayait à la vue des profanes. Personne n'avait jamais pu ou voulu lui dire ce qu'on y trouvait ni ce qu'on y faisait mais son imagination fit tout le travail : il ne lui fallut pas plus de quelques dixièmes de seconde pour visualiser un endroit à faire pâlir un mort. Et Elvire d'être convaincue qu'il fallait, à tout prix, éviter cet endroit.

« Tout au moins pas de mon plein gré. » ajouta-t-elle pour donner plus de force à ses propos.

Ce n'était pas sujet à discussion, sa décision était ferme et définitive et elle espérait de tout cœur que sa nouvelle bienfaitrice ne lui imposerait pas ce qu'elle imaginait être un supplice. Simple, mais terrible. Puis, alors qu'un silence pesant – le calme avant la tempête ? – s'était imposé de lui même, elle releva imperceptiblement la tête et sonda les yeux bruns de l'Inquisitrice. Un petit sourire, timide, étira alors ses fines lèvres et elle saisit la main que lui tendait la jeune femme. Oui, elle avait vraiment envie de lui faire confiance.

« En revanche, je meurs de faim. »

« Et je m'appelle Elvire » ajouta-t-elle. Elle fut tentée d'y joindre un amer mais vous devez sans doute déjà le savoir mais y renonça, ce n'était pas le moment de jouer les mauvaises têtes.

Spoiler:


Dernière édition par Elvire Duverney le Ven 21 Jan 2011, 11:07, édité 1 fois
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MessageSujet: Re: E&T ♣ Un éclair puis la nuit (...) ne te verrai-je plus que dans l'éternité ?   E&T ♣ Un éclair puis la nuit (...) ne te verrai-je plus que dans l'éternité ? EmptyJeu 23 Déc 2010, 02:13

    Cette jeune fille faisait preuve d’une étonnante force de caractère. Sa façon, un peu craintive, d’affronter le regard de l’Inquisitrice et la fermeté de ses propos surprirent Teresa. Elle esquissa un sourire en prenant la main d’Elvire et l’aida à se relever. Ce n’était peut-être pas dans ses habitudes de se montrer si compréhensive, mais elle doutait de la culpabilité de la Singulière. Par conséquent, la laisser ici alors que des monstres allaient bientôt attaquer serait inhumain. Elle inclina la tête vers elle, une lueur amicale dans le regard :

    « Dans d’autres circonstances, j’aurais sans doute été ravie de faire ta connaissance, Elvire. »

    Puis elle l’entraîna à sa suite dans un dédale de ruelles toutes plus tortueuses les unes que les autres. Serrant les doigts de la jeune femme entre les siens, elle se demandait si elle faisait réellement le bon choix. Même si son sixième sens lui disait qu’elle n’était pas une meurtrière, elle pouvait se tromper ; la blonde ne lui avait pas répondu clairement, elle avait fait en sorte de garder une sorte de mystère autour d’elle. Son don ne lui servait par conséquent à rien… Pensive, elle bifurqua dans une avenue pour s’arrêter face à une petite auberge à l’air accueillante. Elle poussa la fugitive devant elle avec un sourire aimable et l’incita à entrer. Lorsque la lourde porte se rabattit derrière elle, le gérant – un homme approchant la quarantaine d’année et assez charismatique – se tourna vers elles. S’il parut surprit de ne voir que des femmes, il ne le montra pourtant pas.

    « J’peux vous offrir quelque chose ? »
    « De la nourriture. Chaude, de préférence. » répliqua l’Inquisitrice.

    Elle désigna du menton une table un peu éloignée, s’y installant par la suite sous le regard quelque peu étonné des rares clients. Teresa fit glisser sa cape de fourrure, révélant sa tenue en cuir et, par la même occasion, la dague qui pendait à sa ceinture. Une façon comme une autre de faire comprendre qu’elle n’était pas sans défense. C’était une méthode d’intimidation simple qui fonctionnait régulièrement sur les personnes trop curieuses, une méthode qui lui venait de Say’l, évidemment. Les iris interrogateurs se détournèrent bien vite des deux femmes tandis que le gérant s’approchait de leur position avec un long plat contenant divers mets tel que de la viande de porc, des sortes de patates dont la forme rappelait plus des racines ainsi que d’autres accompagnements non-identifiés. Trois ou quatre morceaux de pain complétaient le tout. Ce n’était pas du luxe, mais cela avait le mérite de remplir l’estomac. Il déposa ensuite assiettes et couverts en bois.

    « Désirez-vous du vin ? »
    « Un pichet de votre meilleure eau suffira. »

    Un bref hochement de la tête, et il était reparti. La jeune femme se tourna vers Elvire, consciente que cette dernière devait se demander sur qui elle était tombée. Elle n’agissait pas ainsi avec tout le monde, préférant demeurer austère et froide. Distante, en un mot comme en cent. Elle aurait parfois désiré ne pas être si facilement attendrissable, pouvoir brider toutes ses émotions en un claquement de doigt… Mais rien n’était si facile. Rien n’était simple. Teresa décida de laisser sa nouvelle « amie » se restaurer avant de la questionner. Elle se servit une généreuse part de légumes – enfin, à supposer que ça en soit – et de viande avant de faire de même pour la Singulière. Elle avait assez d’argent dans sa bourse pour payer le repas, même si son invitée était gourmande.

    « Mange, ça ne restera pas chaud bien longtemps. Tu es en sécurité, ici. Personne ne connaît ton visage et je ne te dénoncerai pas. Alors mange. »

    Les questions étaient foison dans l’esprit de la Confidente. Elle se demandait si la blonde était liée, d’une façon ou d’une autre, au meurtre de cette pauvre fille. Si ce n’était pas elle qui l’avait tuée, alors qui ? Connaissait-elle le meurtrier ? Si tel était le cas, pourquoi n’avait-elle tout bonnement pas décidé d’aller voir les Inquisitrices afin d’être innocentée ? Non… Hywel transperça une « patate » de sa fourchette en bois. Elle avait forcément quelque chose à voir avec cette affaire. Sinon elle ne se sentirait pas aussi coupable… Et elle ne craindrait pas le jugement de ses sœurs. L’aubergiste réapparu au bout d’une dizaines de minutes, un gros pichet d’eau glacée à la main, qu’il déposa près du plat.

    « Autre chose ? »
    « Ce sera tout, tu peux disposer. »

    Cette façon de parler, cette assurance, elle l’avait acquise au fil de ses voyages en compagnie de Say’l. Il la poussait à prendre la parole pour qu’elle ne passe pas pour une faible femme. Même si elle se cantonnait à un silence mortuaire la plupart du temps, elle savait user de cette force de caractère qu’il lui avait transmise. Cela suffisait en général à éloigner les badauds le temps qu’il revienne pour assurer sa protection. Et à Cathairfal, elle encourrait moins de dangers qu’ailleurs. Normalement.

    « Elvire, c’est ça ? Je sais que le repas n’est pas excellent, mais j’espère qu’il te satisfait. Je n’ai pas pour habitude de laisser les gens mourir de faim. Même s'ils ne me disent pas tout. »
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MessageSujet: Re: E&T ♣ Un éclair puis la nuit (...) ne te verrai-je plus que dans l'éternité ?   E&T ♣ Un éclair puis la nuit (...) ne te verrai-je plus que dans l'éternité ? EmptyVen 21 Jan 2011, 11:05

Jusqu'à ce qu'elles arrivent devant l'auberge où semblait vouloir l'emmener l'Inquisitrice, Elvire choisit de se murer dans le silence. Dès lors, seuls leurs pas légers frappaient le pas au rythme cadencé qu'elles avaient adopté et ce mutisme imposé laissa à la blasonnée tout le loisir de se perdre dans ses sombres pensées.
Elle réalisa brusquement qu'elle n'était plus, ces derniers jours, que l'ombre d'elle même et qu'elle devait offrir une bien triste compagnie à ceux qui croisaient sa route. Et Accolon devait sans doute s'interroger à son propos, peut-être même la trouvait-il sans intérêt ? Après tout, depuis sa naissance, Elvire avait toujours croqué la vie à pleines dents et avait épousé chacune de ses aventures avec frénésie et vivacité, aussi tous ceux qui la connaissaient s'étaient toujours accordé à dire qu'on ne s'ennuyait pas à ses côtés. Elvire était imprudente et la suivre se révélait bien déraisonnable car on était sûr, dès lors, de s'attirer des ennuis mais on l'encourageait, de plus, à continuer. Sans doute aimait-elle les situations périlleuses mais elle était amusante et agréable, d'ailleurs, les jeunes gens de la ville avaient toujours recherché sa compagnie. Avant.
Qu'était devenue cette jeune femme volubile et affable que chaque nouvelle rencontre réjouissait et émoustillait au plus haut point ? Disparue en même temps que Léonie Aronwë...

Elvire sentit une légère pression dans son dos et comprit que Teresa voulait entrer dans cette auberge qu'elle ne connaissait pas. Parce qu'elle n'avait pas vraiment le choix et parce qu'elle était, de toute façon, trop affamée pour se rebiffer, elle pénétra dans l'établissement. La chaleur et la lumière réchauffèrent aussitôt le cœur de la singulière qui retrouva assez d'enthousiasme pour sourire à l'aubergiste lorsqu'il s'approcha d'elles et leur proposa ses services. Comme l'Inquisitrice prenait les devants, Elvire n'eut qu'à la suivre jusqu'à la table qu'elle avait choisi et attendre qu'une copieuse – elle l'espérait vivement – assiette de mets cuits leur soit servie.

L'inquisitrice l'invita à manger mais, dans l'état dans lequel elle se trouvait, la jeune fille se serait de toute façon passer de son autorisation. Étonnant comme la misère pouvait changer un homme ou, dans notre cas, une femme. Elvire se sentait déconnectée de tout ce qui l'entourait et, en vérité, elle n'avait d'yeux que pour son assiette abondante en nourriture – oh, bien sûr, elle n'était pas fameuse mais elle avait le grand mérite d'être copieuse – et si elle entendait des voix, elle n'aurait su dire si on s'adressait à elle ou si c'était les voix des autres tables qui montaient jusqu'à ses oreilles. Après tout, l'heure tournait et le vin avait cet étonnant pouvoir de délier les langues et d'amplifier les sons.

« Elvire, c’est ça ? Je sais que le repas n’est pas excellent, mais j’espère qu’il te satisfait. Je n’ai pas pour habitude de laisser les gens mourir de faim. Même s'ils ne me disent pas tout. »

Son estomac ne criait plus famine et la singulière, à qui la chaleur faisait monter le rouge aux joues, se sentait mieux. Elle sentait non seulement qu'elle avait récupéré les forces qui l'avaient abandonnée mais elle se sentait aussi de meilleure humeur, plus disposée, sans doute, à affronter l'inquisitrice.
Elle haussa un sourcil, plus pour se donner de la contenance même si ses paroles la touchaient en plein cœur et la bouleversaient plus qu'elle ne voulait bien l'admettre. Elle aurait voulu lui crier son innocence, mais, à vrai dire, était-elle vraiment innocente ? Après tout, c'était bien elle qui avait poussé son amie dans le précipice. Si elle avait écouté sa raison et non son cœur, Elvire et Léonie, comme toutes les jeunes filles de leur âge et de leur rang, seraient tranquillement rester chez elles, peut-être près du feu et lisant un livre à leurs parents, et, aujourd'hui, Léonie serait à ses côtés et elles riraient toutes deux à gorge déployée, comme elles le faisaient toujours.
Seulement, Elvire n'était pas avec Léonie et elle n'avait pas le cœur à rire, bien au contraire, repenser à ces tristes évènements et ces souvenirs passés ravivaient les blessures qui n'avaient, d'ailleurs, n'avaient pas eu le temps de cicatriser. Les larmes lui montèrent aux yeux et Elvire ne chercha pas à les retenir. Elle ne voulait plus se montrer plus insensible qu'elle ne l'était, elle voulait retrouver la simplicité et le réconfort des jours passés. Elle aurait bien aimé se blottir entre les larges bras de son père, elle aurait aimé rentrer chez elle et oublier tout ça. Si seulement elle pouvait oublier...

« Je ne lui ai jamais fait de mal, je n'aurai jamais pu. »

Elle n'aurait pas cru qu'il était si difficile de prononcer et d'articuler ces quelques mots. Futiles et enfantins, et pourtant, si lourds de sens.
Et puis elle comprit. Subitement, elle comprit. Violemment. Elle ne tournerait jamais la page si elle s'entêtait à taire ce qu'elle avait vécu. Raconter, parler, décrire lui permettrait d'évacuer et d'extérioriser sa peine et, si ce n'était pas le cas, ça valait toujours le coup d'essayer.

« Elle n'allait pas bien, pas bien du tout, alors nous sommes sorties. Je ne savais pas du tout quoi faire, il nous a aidé. Oh, lui non plus n'est pas méchant, un peu étrange, mais pas méchant. Et puis tout est allé très vite, trop vite. Je n'ai rien pu faire. Personne n'a rien pu faire. Un instant, une seconde, une ombre. Une ombre maléfique. Un couteau, du sang, elle l'a touché en plein coeur – l'ombre – et il y avait du sang partout. Sur mes mains, sur ma robe. Partout... »

Sa voix se brisa et, bien qu'elle essaya, elle ne put plus rien dire.
Ses mots étaient confus, tout comme ses souvenirs, et elle parlait très lentement. Elle ne cherchait pas ses mots, elle n'arrivait juste pas à les prononcer. On aurait dit une enfant confessant un pêché. Son discours, en définitive, était sans doute incompréhensible mais, bien qu'elle n'en ait pas conscience, elle s'adressait plus à elle même qu'à l'inquisitrice. N'avait-elle pas, d'ailleurs, oublié sa présence ?

« Vous savez, je l'aimais tellement. Elle me manque. »

Maintenant, elle avait les yeux tout à fait inondés.


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