« this is a place where i don't feel alone. this is a place where i feel at home.»

Sur la longue route qui devait la mener jusqu’à Tearmainn, Ezephine se lamentait, on lui avait dit qu'elle allait se rendre à ne fête et pourtant sa tenue n'avait rien de festive, la robe qu'elle portait lorsqu'elle avait rencontrée Tanith quelques mois plutôt dans la forêt de l'éveil était devenue rêche à force et était décolorée, comme si cela ne suffisait pas, les chemins de Lanriel l'avait couverte de boue sur au moins un demi pied. Et pourtant elle avait décidée de la garder tout de même, elle était, avec son cheval, les derniers vestiges de sa vie à Cathairfàl. Malgré ces mois passés dans la modeste chaumière de la sorcière, Ezephine se sentait toujours lié à son devoir et à sa vie de noble, certes vivre avec Tanith lui avait permis de vivre en étant elle même mais elle se rendait bien compte que cette situation de pourrait durer et que tôt ou tard il lui faudrait assumer les conséquences de sa fuite.
Un des cinq colosses escortant la jeune femme et celle qu'elle considérait désormais comme sa professeure se plaignit de la pluie, Ezephine eut envie de l'appuyer dans ses doléances mais ne trouva pas le courage de se plaindre à son tour, elle ne dégagea même pas la large mèche de cheveux qui lui pendait lamentablement devant les yeux pour jauger l'homme.
De même elle resta dans sa torpeur lorsque ses compagnons discutèrent à propos de la nécessité de se rendre dans une auberge, cependant un bruit les ramena tous à la raison, la jeune Ezephine également : « Des chevaliers ». Oui l'homme avait raison, ils s'agissaient bien des troupes du roi Hardansson, son cheval suivant machinalement les autres, elle ne relava la tête que lorsqu'ils se trouvèrent assez en hauteur du convoi pour pouvoir l'observer sans se faire repérer. En regardant passer l'imposant carrosse elle se surpris elle-même à chercher quelque chose, ou plutôt quelqu'un. Le quel des deux ? Elle n'en savait rien, elle sut seulement qu'elle éprouva à la fois une grande gratitude et une grande désolation quand elle apprit qu'il s’agissait de Scarlett De Vinter.
Le reste du trajet se passa dans le silence le plus complet, du reste Ezephine se posait bien trop de questions pour prendre le temps de se préoccuper de paroles dautrui : A quoi ressemblaient les druides ? Quelle était cette fête où elle se rendait au juste ? Trouverait-elle réellement des gens de la même "espèces" qu'elle ? "Oui" se dit-elle, oui elle rencontrerait des gens comme elle, elle en avait la certitude, une petite voix au fond d'elle le lui soufflait, cette petite voix qu'elle avait souvent haï, cette voix qu'elle avait longtemps prétendue ne pas avoir, elle se trouvait libre de l'aider maintenant, car à quoi pourrait donc servir la magie si ce n'est pour servir les humains ?

« C'est ici que nos chemins se séparent pour la soirée, Ezephine. Tu devras tenter tes propres expériences, je ne serai plus là pour te guider. Par ailleurs, c'est à toi de décider si tu désires rester parmi les tiens. Si tel est le cas, j'ai été honoré de t'avoir près de moi. N'oublie pas que la magie est plus puissante que tu ne le crois. Laisse-la te guider vers ce qui te semble le plus courageux. Les autres druides seront sûrement ravi de t'accueillir parmi eux... ils t»'apprendront tout ce que tu dois savoir... Si tu veux, une fois les célébrations terminées, tu peux toujours te joindre à moi. Je pars demain, à l'aube... »
Ainsi elle se retrouva seule, perdue dans cette foule où elle ne connaissait personne et où certainement personne ne la connaissait. Perdue elle se rendit tout à coup compte qu'elle était trempée, marchant tel un fantôme vers le feu le plus proche elle s'assit sur une souche tout aussi humide et son regard perdit dans la contemplation des flammes. Elle ne saurait dire combien de temps elle était restée assise là, perdue dans ses pensées, mais lorsque l'agitation et les cris alentours la firent revenir à elle, la nuit était bel et bien tombée sur Lanriel, déjà on voyait les premières étoiles se lever. Ce fut seulement lorsqu'elle leva la tête pour les observer qu'elle aperçut une ombre qui avançait lentement vers elle, alors elle sentit ses entrailles se resserrer et son souffle se raccourcir, venir ici avait été une mauvaise idée, elle le savait dès le départ et pourtant son instinct l'avait poussé à franchir le pas. Durant les secondes que mit l'ombre à se trouver à sa hauteur, Ezephine fut prise de colère envers la magie et envers Tanith qui l'avait obligée à accepter cette dernière.

Si il y avait bien une fête qu'Azazel ne manquait jamais de célébrer, c'était Beltane. Il adorait cette fête depuis son enfance, quand ses yeux encore innocents ne comprenaient pas tout ce qu'ils voyaient. Ses parents avaient toujours tenus à faire le déplacement jusqu'à Tearmainn chaque année pour célébrer cette fête. C'était une tradition et ils y rencontraient toujours d'autres familles. Quand il avait grandit, Azazel avait porté un autre œil sur cette fête, son intérêt ayant été modifié mais sans être augmenté ou atténué. C'est durant la fête de Beltane qui avait eut lieu l'année de son seizième anniversaire qu'il était devenu un vrai homme. La fille était un peu plus âgée que lui, et d'une condition sociale équivalente. Azazel ne se souvenait pas de son nom et ne l'avait jamais revu. D'elle, il ne gardait que le souvenir d'un sourire éblouissant et charmant. De ce qu'il en savait, ses parents avaient abandonnés cette tradition du déplacement car il ne les croisait jamais. A moins qu'ils soient tout simplement morts ... Il chassa cette pensée de sa tête. Il ne repensait jamais à sa famille, il trouvait cela inutile et douloureux. Il savait que si il avait voulut il aurait pu retourner à la demeure familiale et qu'il aurait été accueilli tel le fils prodigue. Mais ça ne l'intéressait guère : sa famille ne l'avait jamais comprit et avait toujours cherché à le changer. Il ne voulait pas dans sa vie des gens qui prétendaient l'aimer en même temps qu'ils ne supportaient pas sa vraie personnalité.

Il avait fait le déplacement plusieurs jours avant, mettant de côté les missions dont il était chargé. Son commerce s'était arrivé très rentable et il pouvait bien s’octroyer une petite pause. Il n'y a que pour Beltane qu'il faisait ça. Et ça n'avait rien à voir avec le côté druidique de la fête bien sûr ... Azazel aimait les femmes mais parce qu'il était trop rustre, il se retrouvait confronté à bien des difficultés pour arriver à en séduire une seule. Il n'avait jamais se problème durant la nuit de Beltane et était à chaque fois certain de terminer la nuit avec une ravissante demoiselle qui ne lui demanderait rien en retour que le silence sur leurs ébats. Pour cette occasion, Azazel d'ordinaire si peu attentif à son apparence avait fait un effort : une belle chemise en lin beige et un pantalon noir. Il n'y avait que ses vieilles bottes qu'il trainait chaque jour pour rappeler qu'il n'était pas aussi intéressé que ça à l'image qu'il renvoyait. Ses bottes étaient d'ailleurs bien sales, preuve du temps et de la distance qu'il avait parcourut. Il n'avait toujours pas racheté de monture et avait fait le voyage à pied, ou en charrette quand des voyageurs étaient assez aimables pour prendre un voyageur supplémentaire - gratuitement bien sûr.

La fête venait tout juste de débuter lorsque Azazel arriva. Il était en compagnie d'une petite famille avec qui il passa un assez long moment. Leur fille, une jolie brune à la peau sombre d'une vingtaine d'années plaisait beaucoup au jeune chasseur de primes mais elle partit rejoindre son amant régulier de Beltane et il se décida à aller sonder la foule à la recherche d'une belle demoiselle. Celles qu'il croisait étaient déjà toutes en pleine conversation avec un autre homme, ou trop entourées pour qu'il tente une approche. Puis, près d'une feu, il repéra une silhouette féminine, assise sur une souche. L'air fragile, perdu, ce qui en faisait la cible idéale. La jeune femme recherchait sans doute une compagnie pour la nuit, pour s'exposer ainsi à la vue de tous les hommes. Azazel eut un sourire, constatant qu'aucun autre ne s'était encore approché d'elle. Il s'avança vers la souche et la jeune femme.

A mesure qu'il approchait, la chevelure brune et la robe lui rappelèrent de vagues souvenirs. Puis les flammes éclairèrent son visage : Ezephine Bassey. C'était une jeune Blasonnée qu'Azazel connaissait bien. Il y a plusieurs mois, il avait été engagée par une "amie" de la jeune femme afin de trouver des faits compromettants sur elle. Il avait essayé de devenir son confident, sans grand succès. Il avait pensé que sa mission n'aboutirait pas puis ils avaient croisés un soldat. Azazel s'était renseigné sur son nom : Niethen. Et en un seul regard, il avait comprit que quelque chose se tramait entre eux, de suffisamment honteux pour que Ezephine se montre gêné. Il avait donc prit le partit d'essayer de la séduire pour savoir si son intuition était bonne ou non. La Blasonnée acceptait ses avances, s'en offusquait parfois mais jamais rien de concret ne s'était jamais passé entre eux puisqu'elle avait mystérieusement disparue un jour. Ses parents offraient une jolie prime pour quiconque la ramenait à la maison.

« On dirait bien une Blasonnée en cavale. » Dit-il en guise de salutation. Il s'arrêta juste devant elle et fit une sorte de mini révérence moqueuse. Ezephine n'avait plus rien de la coquette Blasonnée qu'il avait connue. On aurait plutôt dit une fille du peuple ayant volé la robe usagée de sa maitresse. C'était assez ridicule. Mais Ezephine restait jolie. Puis Azazel s'agenouilla devant elle pour être à sa hauteur. Sa première mission vis à vis de la jeune femme n'avait plus aucune raison d'être : quoi de fait plus honteux que de s'enfuir de la maison pour une jeune fille respectable. « C'est étonnant car il semblerait que votre chevalier servant soit resté sur place, lui. » Un sourire provocateur se plaça sur ses lèvres tandis que sa main se plaçait sur un des genoux de la jeune Blasonnée. « Mais je veux bien le remplacer pour cette nuit ... » Sait-on jamais, peut être que Ezephine se sentait seule et Azazel serait ravi de lui faire oublier sa solitude.

Spoiler:

Beltane.. Il n’avait plus assisté à ces rassemblements et ces feux de joies depuis bien longtemps, néanmoins il se souvenait parfaitement de ce qu’il s’y passait et de la manière dont certains la fêtaient.. De nombreuses raisons avaient fait qu’il ne s’était plus déplacé, la première étant la volonté. Il ne tenait pas particulièrement à cette célébration, ayant été loin de prier Eydis ces dernières années et ne voyait donc pas pourquoi il se fatiguerait à faire le voyage. La seconde concernait une personne, celle qui n’avait plus cette volonté non plus ni même l’obligation de s’y rendre: Izhelindë. Il préférait rester en sa compagnie, quitte à devoir renoncer à quelques jours de congés plutôt que partir et ne trouver sur-place que l’ennui en guise d’ami.. Pourtant il devrait s’y plaire en tant qu’homme.. loin de refuser une compagnie chaleureuse, il n’en restait pas moins indifférent. Mais alors, pourquoi aujourd‘hui ? Qu’est-ce qui avait changé pour qu’il se retrouve sur les routes de Tearmainn, à dos de cheval ? Il avait entendu que miss De Vinter serait la représentante des Hardansson cette année et il s’était mis en tête de l’accompagner, pour cela il avait préalablement demandé à la princesse quelques jours de congés, celle-ci avait bien entendu accepté.. ainsi donc il avait suivi le convoi de la Dame et ne l’avait quitté qu’à destination. De ce qu’il avait pu remarquer chez la blasonnée, elle ne devait pas beaucoup apprécier Beltane et la situation eut don de l’amuser, mais il n’était guère resté plus longtemps en sa compagnie et s’en était allé de son côté. Il ne la croisa plus de la journée.

Du plus loin qu’il s’en souvienne, il y avait toujours eu beaucoup de monde lors des célébrations de Beltane.. Beaucoup de visages inconnus et si peu de familiers, voire aucun. C’était comme chercher une aiguille dans une botte de foin …cependant dans son cas, il savait exactement où la trouver et n‘avait plus qu‘à attendre. Pendant ce temps, il s’était installé sous un arbre et avait observé les mouvements de foule sans jamais n’y prendre part. Mais ainsi isolé, il reçut la visite de jeunes demoiselles auxquelles il était resté insensible et parfois même de couples, déçus que la zone ne soit pas si tranquille qu’ils ne l’avaient crus. Il n’était pas sur-place depuis longtemps, deux heures tout au plus avant que le voile obscur de la nuit ne tombe sur les lieux, faisant apparaître les premières étoiles dans ce ciel qui semblait attirer toute son attention.. C’était pour bientôt se dit-il, tandis que plus loin les feux de camps n’étaient plus que les seules sources d’éclairage, mais certainement pas de chaleur pensa-t-il amusé. Puis il posa son regard sur cette silhouette à nouveau, elle était seule.. mais toujours présente, il l’observait depuis son arrivée et attendait. Elle semblait si fragile et perdue, comme si elle n’avait rien à faire ici, mais il savait qui l’avait accompagnée et qui la rejoindrait sous peu. Ezephine.

Voilà bien longtemps qu’il ne l’avait vu et aujourd’hui, il la retrouvait. Qu’avait-elle fait tout ce temps ? Où était-elle partie ? Bien que désormais il en avait une petite idée.. Il s’était fait beaucoup de soucis pour son amie, connaissant sa condition qui était la même que lui, il la savait désorientée et influençable.. d’où son attachement soudain pour la jeune femme. Il l‘aura finalement retrouvée et non sans aide, la brune lui était apparu en rêve il y a trois jours, en ce même lieu et à cette même place, or il ne l’avait pas vu seule.. Ce pourquoi il n’était pas allé à sa rencontre et avait attendu que cet autre visage familier n’apparaisse. Azazel. Entre tous, pourquoi eut-il fallu que ce soit lui ? Si arrogant, si détestable.. non vraiment, il n’avait rien pour lui si ce n’était son charisme. Il s’était agenouillé devant la jeune femme et lui avait adressé quelques paroles dont il devinait la nature, mais dont il se fichait éperdument. Aussi se leva-t-il et tira sur ses muscles avant de défroisser ses vêtements et de faire quelques pas. Malgré ce jour de fête, il n’avait guère fait d’effort pour améliorer son allure. Une chemise aux couleurs ternes et un pantalon sombre, il n’était pas venu dans le but de plaire à vrai dire et ce fut aussi à cela qu’il avait deviné qu’Ezephine non plus. Pour une blasonnée, elle portait une robe bien trop usée et ternie, pour autant elle n’en restait pas moins jolie. Il s’était approché du duo à pas de loups, ne s’arrêtant qu’à un mètre du jeune homme accroupi, à sa gauche. Il devait l’avoir remarqué à présent, quand à Ezephine, c’était plus que certain. « Quelle coïncidence de tomber sur vous …ici, Dame Ezephine. » Son ton ne dénotait d’aucune animosité, il était à la fois contrarié et heureux de la revoir, cela dit il n’était pas tranquille. Venir ici fut son choix, mais il aurait très bien pu ignorer les visions d’Eydis comme il le faisait parfois et alors, il aurait été certain d’éviter les ennuis, de l’éviter elle. Il ne voulait pas la voir et jusqu’ici il ne l’avait vue nulle part, la fête s’étendait sur une grande zone ..et il espérait que cela suffise à la garder à distance. Cette sorcière.

Il ne souriait pas, il n’en avait pas vraiment le cœur et se tenait droit, sûr de lui devant cet importun qui usait de son charme auprès de son amie. « En revanche je ne suis pas étonné de votre présence, chasseur de primes. » Il posa dès lors les yeux sur sa personne tandis que son aversion pure pour l’homme s’était ressentie dans chacun de ses mots, une fois de plus il l’ignorerait et une fois de plus, Esendril se verrait mit de côté. Cependant l’écuyer semblait déterminé à changer la donne, il en avait plus que marre de ses manières et il faudrait bien qu’un jour, il le prenne réellement au sérieux. Certes le chasseur le maîtriserait à plate couture s’il était question de se battre, mais ce n’était pas ce que le plus jeune cherchait. Loin de là d’ailleurs. « Oh pardon …aurais-je interrompu quelque chose ? Vous m’en voyez navré. » Il jouait peut-être avec le feu, peut-être pas. Et bien qu’il était content de revoir la jolie brune, ses choix et sa fuite lui étaient quelque peu restés en travers de la gorge. Mais toute cette hargne ne s’adressait véritablement qu’au brun.

[...] À la faveur de la nuit close, les bannières avaient noirci. Les festivités s'étendaient sur des lieux entre la route et la clairière. Dans cette pagaille d'hommes, d'arbres et de chevaux, rien de si aisé que se perdre. Et Tanith s'y perdit, volontairement. Elle dépassa une douzaine de grandes tentes, une centaine de petits feux -omis le grand braiser au centre de la clairière - où mitonnaient des mets divers. Parmi les tentes filaient toujours les lucioles, telles d'infimes météorites. Au loin, des voix entonnaient quelque refrain obscène, gloussant, nue sous son manteau de fourrure et d'ombre, une femme dont le poursuivant trébuchait, ivre mort, de racine en souche. Des bouffées de saucisses à l'ail lui dilatait les narines, de-ci de-là, si tentantes, si savoureuses, si chargées d'épices que son ventre vide en grouillait d'émoi. Tous s'empiffraient de cheval rôti, laqué de miel et truffé de piments, tous se saoulaient à mort de lait jument fermenté, tous se vomissaient, par-dessus les feux, d'épais quolibets, tout cela étourdissait la Sorcière de ses âpres voix on ne peut plus déconcertantes. Aussi affamée fut-elle, elle s'entêtait tout de même à poursuivre son chemin. Quittant le dernier cercle auquel elle avait prit part, ses hommes de mains, d'énormes hommes vêtus de noir, à la peau tanné tant elle était sale et mal lavée. Il devenait même difficile pour elle de deviner sur l'ombre qui charbonnait leur menton était celle du doux duvet masculin ou rien de plus que les restes du repas de veille. Elle poursuivait son chemin, passait devant les silhouettes élancées sans y accorder le moindre regard. Elle n'avait qu'une seule idée en tête; retrouvée celui qu'ils avaient retrouvés. Le balafré était venu jusqu'à elle, lui soufflant au creux de l'oreille qu'ils avaient retrouvés celui qu'elle cherchait depuis quelques semaines déjà...

Nul ne prenait garde à elle. Nul lui adressait la parole, nul n'avait cure de sa personne, exception fait de quelques âmes errantes, esseulées, qui l'abordaient. Trop chancelants, ils s'effondraient avant même de l'aborder convenablement. Dommage, puisque Tanith songeait de plus en plus à expérimenter les célébrations de cette fête. Soudain, le ton d'une nouvelle conversation vint jusqu'à ses oreilles. Un petit groupe, plus en recul des autres; leur dialecte était, somme toute, plus cohérent que le charabia qu'entretenait tous les autres voyageurs qu'elle avait croisés jusqu'à maintenant. Se précipitant furtivement vers un buisson, l'éclat sauvage de ses yeux y chasse ses habitants. Nouvelle propriétaire de cet observatoire de choix, elle voit sa pupille en compagnie d'un charmant jeune homme. Malgré les chants et les rires gras, elle parvient tout de même à comprendre ce qu'ils se disaient : « On dirait bien une Blasonnée en cavale » Les sourcils de la Sorcière se froncèrent lorsqu'elle croit reconnaître la voix du jeune homme. Ses doutes se révèlent fondés lorsqu'elle entendit, par la suite : « C'est étonnant, car il semblerait que votre chevalier servant soit resté sur place, lui...Mais je veux bien le remplacer pour cette nuit ... » Un sourire amusé se dessine sur le coin de ses lèvres. Elle avait bel et bien retrouvé Azazel... Ce singulier qu'elle avait rencontré à Mogaròr. Il lui avait proposé une association et à son tour, elle lui avait proposé un jeu; malheureusement, ils n'avaient pas eu la chance de déterminer le vainqueur de cet enjeu...

[...] « Quelle coïncidence de tomber sur vous ...ici, Dame Ezephine » Les airs de la Sorcière changent, subitement. Ce qu'elle pensait être une réjouissance se révèlent beaucoup plus fâcheuse, car déjà, un ennemi se présentait sur scène. Furieuse, elle se taire tout de même dans son repaire, alerte. Ce petit écuyer, celui qu'elle méprisait tant pour connaître son terrible souhait. Il poursuit son dialogue et, secouée de pensées obscurs, Tanith se tint de réagir. « Oh pardon ...aurais-je interrompu quelque chose ? Vous m'en voyez navré » « Épargne-nous ces gentillesses, Esendril » fuma-t-elle une fois sa silhouette dégagée des buissons. Énigmatique, elle s'avance un peu plus, puis, les bras le long du corps, le regard sombre les sourcils froncés, elle ajoute une fois arrêtée : « Qu'est-ce qu'un écuyer fait aussi loin du château ? On t'aurait peut-être attitré d'être le serviteur de dame de Vinter ? Tu n'es bon qu'à servir, forcément... Certainement pas chevalier, avec le peu de chaire que tu as... tu ne pourrais même pas tenir une épée » Ses mots prononcés, elle fronça davantage les sourcils, d'incompréhension cette fois : « Si loin de ta princesse... que fais-tu ici ? » Elle ne se soucia guère des deux autres. La seule menace que représentait Esendril à ses yeux lui tortillait l'estomac, si bien qu'elle dû tapisser son visage pour ne pas exprimer sa nervosité.

On toqua à la porte, « entrez » dit la voix grave, « vous m'avez fait mander père ? » . Le jeune femme entra non sans crainte dans les appartements de son père, il l'avait toujours terrifié et cela allait en s'accentuant depuis quelques temps. Autrefois sa crainte était la réponse à la loyauté et à l'admiration qu'elle vouait à son père, désormais cette crainte était belle et bien réel, c'est la crainte de se faire prendre. Elle n'avait jusqu'à il y a quelques mois rien caché, ou du moins rien d'important comparée à ce qu'elle se gardait de dire depuis qu'elle s'était perdue en forêt et qu'elle y avait rencontré Tanith.
« J'ai entendu dire que vous souhaitiez vous rendre à la fête de la Beltane ... » . Elle resta muette quelques instant ne sachant de quelle manière répondre « Est-ce vrai ? Repondez-moi Ezephine» . Son ton était calme mais elle savait que cela ne signifiait rien, elle dégluti avec difficulté « avec votre permission père je ... » « Bien vous irez avec Dame De Vinter» . Elle n'en cru pas ses oreilles, c'était là la première fois que son père sans attendre son semblant d'argumentation accédait à une de ces requêtes. Ne sachant comment répondre, une fois de plus son paternel ajouta avant qu'elle n'ai eu le temps de peser sa réponse « je vous trouve changé Ezephine depuis ce jour où l'on vous à retrouvé en forêt » . Sa réponse cette fois-ci ne se fit pas attendre « vous trouvez ? comment cela ? » . Elle se mordit alors la langue pour avoir formuler cette réponse téméraire, son ton était celui de la défense et pendant un moment se sentis perdu, jamais elle n'avait auparavant parler ainsi, elle était discrète et en disait le moins possible. Son père cependant ni vit que du feu, ou du moins il garda ses réflexions pour lui « pour rien, merci Ezephine vous pouvez disposer». Elle quitta alors la pièce sur une révérence.

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Se débarrasser des gardes fut chose aisée, cela le devenait d'ailleurs de plus en plus. Déambulant au milieu de la foule grouillante elle avançait espérant trouver celle qu'elle considérait désormais comme une tutrice, une tutrice magique bien sûr. Aussitôt qu'elle vit Tanith celle-ci l'abandonna cependant. Ainsi de retrouva t'elle sur cette souche devant le feu. Toit autour d'elle de faisait entendre gémissements et rires, chansons paillardes et cris. Personne ne l'avait prévenu du caractère sexuel de cette fête, elle même de serait d'ailleurs sentie mal à l'aise si on avait évoqué ce point. Sa principale qualité ne relevait-elle pas de sa vertu après tout ? Perdue dans ses pensées, elle percevait néanmoins les chuchotements du groupe de trouvant derrière elle : « c'est la jeune Dame Bassey, la promise du prince, tout le monde la croyait perdue ou en cavale, on raconte même dans le royaume que son père offrait une prime ... » Ainsi donc voilà ce qui de disait d'elle dans le royaume ? Son orgueil en fut blessé mais cela n'était rien comparé à la voix nasillarde qui, la plongeant un moment dans la stupeur et la colère, émergea de l'ombre :  « On dirait bien une Blasonnée en cavale ». Ezephine ignora son air moqueur, elle savait que le voyage qui l'avait menée ici avait défraichi sa toilette. Elle se contenta de le sonder de ses yeux noisettes en le laissant répandre son venin. Elle n'était pas dupe, ou du moins elle ne l'était plus depuis qu'elle avait accepté ses pouvoirs. Elle ne pû s'empêcher pourtant de rougir lorsqu'Azazel mentionna Niethen. Elle s'apprêta à lui répondre quand une autre voix, qui lui était de loin la plus sympathique des deux de fit entendre :  « Quelle coïncidence de tomber sur vous …ici, Dame Ezephine » . Pour la première fois depuis plusieurs jours elle sourit alors. Elle savait qu'Esendril allait venir. Elle resta muette durant le laps de temps où les deux jeunes gens se firent part de leur animosité réciproque et s'apprêta à mettre fin à cela quand sorti d'on ne sait où Tanith. « Qu'est-ce qu'un écuyer fait aussi loin du château ? On t'aurait peut-être attitré d'être le serviteur de dame de Vinter ? Tu n'es bon qu'à servir, forcément... Certainement pas chevalier, avec le peu de chaire que tu as... tu ne pourrais même pas tenir une épée. Si loin de ta princesse... que fais-tu ici ? »  Ezephine regarda Esendril son regard n'exprimant alors que de l'incompréhension. Ainsi Tanith le connaissait. « Il venait me saluer rien de plus ... Il faut dire que depuis ma mésaventure en forêt je ne suis guère sortie » puis de tournant vers Azazel elle ajouta « c'est du moins ce que j'ai cru comprendre ... » Elle éprouvait envers le chasseur de prime des sentiments mitigés, il avait autrefois voulu être son ami puis s'était mis à lui faire des avances, avances qu'elle acceptait parfois faute de ne savoir que faire d'autres. Mais elle avait fait un rêve, elle avait rêvé qu'il recevait de l'argent d'une des nombreuses vieilles peaux dont la fille était à marier peuplant la cour.
Quiconque ayant connu Ezephine avant sa rencontre avec Tanith pouvait de rendre compte du changement dans sa voix bien que ces manières restèrent toujours celle d'une jeune femme apeurée, perdue et bien qu'elle ne s'en rendit pas encore compte entouré d'ennemis. Alors pour briser ce sentiment de solitude elle ajouta : « Je sais que je peux tout vous dire Esendril, j'ai rencontré Tanith le jour où je me suis perdue en forêt, je sais tout à présent, elle est mon amie ... »

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