Elle te guidera dans la nuit || Blodween Noctuam

Je devais jouer avec le feu. Parce que c'était le seul moyen que j'avais d'attirer ton attention. Je me brulais souvent, mais la souffrance ne m'était pas aussi intolérable que ton indifférence à mon écart. Alors un jour j'ai disparu. Alors tu as enfin pris conscience que je coutais pour toi. Mais la mort est-elle l'unique solution pour que tu m'aime enfin ?
“ Venez-vous donc jouer avec nous petite soeur ! Nous vous apprendrons à manier l'épée et à tirer la flêche si vous le désirez. Après tout, vous n'avez rien d'une femme : ni la beauté, ni la grâce, ni la prestance. ” L'enfant était assise dans l'herbe près de ses frères tous plus âgés qu'elle. Elle les regarda avec un air mauvais, ne sachant pas si elle devait être flattée ou vexée par la proposition de Gwohag au sérieux ou non. Elle se méfiait toujours de l'ainé de ses frères, parce qu'il était plus prompt à la moquerie et à la méchanceté que les autres. Il était sadique, tuant les animaux innocents uniquement pour voir la couleur du sang. Elle le savait, tout le monde le savait mais la famille cachait ces faits du mieux qu'elle pouvait. Alors, la jeune enfant se tourna vers Theadus son frère jumeau. Ils étaient si proches que souvent ils faisaient les mêmes rêves. Il lui souriait avec une forme de bienveillance. Alors c'était sans doute vrai. Son frère acceptait - enfin - de lui apprendre à manier une arme. Elle était sur le point de se lever pour accepter, lorsque la porte de leur maison s'ouvrit, laissant paraitre leur nourrice qui s'élança vers eux avec un pas chancelant. “ Messires ! Je n'ai pu m'empêcher d'entendre votre conversation., qui me déplait fortement. Sachez que votre petite soeur est trop jeune pour manier une épée, et quant bien même ce ne serait pas le cas, elle n'est pas faite pour l'art de la guerre. Venez Blodween, nous allons travailler votre crochet. ” C'est avec mauvaise grâce que la plus jeune de la famille Noctuam suivit sa gouvernante. Elle ne l'aimait pas. Elle était grosse et elle puait souvent la sueur. Mais elle était une proche de la famille de sa mère alors elle devait lui montrer du respect. Cependant, de tout ce que Hidia pouvait lui apprendre, Blodween n'en trouvait nul intérêt. Elle avait appris à lire et à compter, comme tous les sorciers. Elle devait apprendre à tenir une maison, cuisiner, coudre, mais elle n'était bonne pour aucune de ces activités. Elle s'ennuyait à faire du crochet alors que ses frères montaient à cheval ou s'entrainer au combat. Elle était attirée par les armes, plus que par les aiguilles. Sa mère le déplorait, mais cela amusait son père qui y voyait là la preuve de son appartenance au Noctuam. Cette famille ne comptait que peu de filles en son sein. Cela faisait trois générations qu'il n'y avait pas de filles, et Blodween n'était femme que par l'apparence. Elle avait un caractère belliqueux et capricieux qui rendaient ses nourrices et sa mère complètement folles. Elle s'entendait bien mieux avec les garçons qu'avec les filles du village, et elle courait les bois en leur compagnie. Elle n'avait peur ni de la boue, ni du sang. Elle rêvait de voyager, et de connaitre l'excitation. Elle ne voulait pas s'ennuyer comme sa mère. Elle ne voulait pas rester prisonnière d'une maison. Elle voulait vivre. Déjà, depuis son plus jeune âge. Elle ne savait pas où cela pourrait la mener, mais elle voulait vivre. Alors, si sa nourrice ne voulait pas qu'elle touche une arme, alors qu'elle était âgée de sept ans, elle ne le ferait pas devant elle. Elle réveilla son frère jumeau une nuit, et lui demanda de lui apprendre. Dés lors, à la nuit tombée, elle le retrouvait dans la cours à l'arrière de leur maison, et ils se battaient avec de longs bâtons en bois. Il lui appris à tirer des couteaux, à viser, à utiliser un arc, et à tenir une épée. Mais elle était bien trop frêle pour supporter le poing du manche, et jamais elle n'eut la chance de tenir cette arme si noble.


Je ne sais pas aimer et je sais que tu le déplore. Tu ne m'as jamais appris à aimer, alors comment veux-tu que je sois capable d'être bonne. Je ne suis pas seule que tu voudrais que je sois. Es-tu aussi prétentieux que cela pour prétendre savoir qui je suis ? Moi-même j'ignore qui je peux être, et encore plus qui je voudrais être.
“ Tu es sur mon fils de vouloir nous quitter ? Tes frères sont déjà aller au-delà des collines, dans des citées perdu, ou à la guerre. L'un d'entre eux est entré dans les ordres, et un autre est au service du roi. Et toi, que veux-tu ? Partir uniquement à travers les chemins à la recherche de... Vérité ?” Blodween, Theadus et leur père se trouvaient dans le grand salon, autour du feu. La jeune femme regardait les flammes danser sous ses yeux, et pleurait en silence. Elle supportait mal l'idée de voir son jumeau la quitter, mais la vie était ainsi faite. Elle ne pouvait pas le retenir. Elle ne savait pas ce qu'il allait devenir. Peut-être irait-il dans la Capitale pour aider leur roi, peut-être irait-il dans le Nord pour découvrir les montagnes enneigées. Peut-être ira-t-il sur les mers et découvrira-t-il de nouvelles beautés. Elle n'en savait rien, tout ce qu'elle savait c'est qu'il y avait peu de chance pour qu'elle le retrouve un jour. Il avait dix-sept ans, et il avait envie de vivre sa vie à présent. Il faisait ses adieux à sa famille aujourd'hui. La mère de Blodween s'était enfermée dans sa chambre quand son frère avait annoncé qu'il partait. Blodween pouvait entendre ses pleurs. “ Oui père, je m'en vais. Mes affaires sont prêtes et j'ai acheté un cheval avec l'argent que vous m'aviez concédé. Il est temps que je devienne quelqu'un à mon tour. ” “ Laisse moi t'accompagner mon frère ! Nous sommes du même sang, nous ne pouvons pas vivre l'un sans l'autre. ” Demanda la jeune femme en tournant vers lui un visage noyé de larmes. Il se tourna vers elle et lui caressa la joue avant d'embrasser ses lèvres comme il le faisait quand ils étaient enfants pour la calmer. Son frère qu'elle aimait plus que quiconque en ce monde. “ Un jour ma chère soeur, tu partiras à ton tour. Alors nous nous retrouverons, je te le promets. ” Il partit en effet le lendemain. Elle resta encore trois ans seule avec ses parents. Durant ce temps-là elle changea énormément, et la raison en était de son père qui la choisi pour intégrer un clan qui n'avait rien d'officiel et qui pourtant partager les mêmes croyances qu'elle. Elle comprit alors qu'il l'avait élevée dans le seul but de lui faire suivre ses traces. Elle fut accueilli les bras ouverts par les Héritiers, et commença une nouvelle vie en leur sein. Elle comprit que son amour pour le mal et la souffrance n'était pas dû à sa seule passion, elle avait été choisie par Mynkor pour le servir. Elle se sentit - pour la première fois de sa vie - belle et importante.

La nuit tombe enfin, et je m'éveille. Je ne vis que pour la beauté des étoiles. La vie m'abandonne à mesure que les jours passent. Tant que je suis près de toi. Alors j'ai pris une décision importante, et aujourd'hui je te quitte. J'ai décidé de vivre, non pas pour ton plaisir, mais pour mon bonheur. Adieu. Je joue mon premier coup sur ce jeu d'échec.
Elle était dans l'ombre, observant le couple au loin qui discutait dans une ruelle déserte. Elle ne bougeait pas, bandant son arc, immobile. Elle visait le cœur de l'homme et attendait le moment propice pour tirer. Elle ne connaissait que son nom, point son crime mais ce n'était pas de son devoir de le demander. Cette fois ce fut un riche noble de la Capitale qui lui avait demandé ses services. Cela faisait cinq ans qu'elle était Dans le commerce et elle avait commencé à se faire un nom. Dans le métier, on l'appelait Noctuam qui signifiait l'oiseau de nuit . Elle tuait surtout une fois que la lune baignait les villes de sa lumière blafarde. La journée, elle jouait son rôle de recruteuse et parcourant les chemins autour de la Capitale. Elle connaissait nombre d'Héritiers, et ses clients étaient pour la plupart des gens de la haute classe qui désiraient se venger d'un amant, d'un rival ou d'une femme. Elle, elle ne faisait aucune distinction entre les victimes. Depuis qu'elle avait tué la première fois - par accident - elle cherchait à retrouver cette adrénaline, ce sentiment de puissance qui la rendait vivante. Elle adorait cela. Si elle était devenue une assassin c'était pas qu'elle savait qu'elle était faite pour cela. Pour tuer. Elle n'aimait que cela et elle était douée.
Elle perdit le flot de ses pensés quand la femme partie, après un ultime baiser. Alors, quand elle eut le dos tourné, la jeune femme bandit son arc et tira. En plein coeur. L'homme regarda dans sa direction, sembla la voir et tomba sur le sol froid et humide. La jeune femme poussa un cris strident, et l'assassin disparut dans le noir. “ AU SECOURS ! JE VOUS EN SUPPLIE VENEZ M'AIDER ! ” Criez la belle courtisane, penchée sur le corps de son amant mort. Un bruit la fit réagir et elle leva le regard. Un chat, noir comme la nuit, la fixait avec un air malsain. Il sembla sourire avant de quitter la ruelle en courant. Ce chat s'en alla retrouver une auberge au nord de la ville, à quelques rues de l'accident. Entrant par une fenêtre de l'étage, il disparut avant de toucher le sol, laissant place à la belle Blodween qui se prépara à passer le restant de la nuit dans son lit. Avant de reprendre la route le lendemain matin.