Khaleb; à coeur vaillant, rien d'impossible.

« Mais comment a-t-on pu en arriver là?»

DITES NOUS TOUT

Deuxième âge II, année deux.


« Rien n’est plus lent que la véritable naissance d’un d’homme » Marguerite Youcenard.

Certains pensent qu’il est nécessaire qu’un bébé cri ou pleure à la naissance pour qu’il soit en bonne santé. C’est faux ; émettre de petits bruits suffit. Quand il vint au monde, Khaleb ne pleura pas, ne cria pas davantage. Il se contenta d’émettre des gazouillis, respiration haletante et douloureuse, ses petits yeux fermés et ses poings serrés s’agitant frénétiquement. Sa mère était inquiète, son père le regardait comme s’il n’allait pas survivre à cette dure épreuve de l’accouchement. Et pourtant il allait très bien. C’était un beau bébé en pleine santé. Seulement il avait choisi d’être discret, de ne pas entrer en compétition avec les grognements de souffrance que sa mère avait hurlés en le poussant hors de son ventre. Il estimait que sa venue au monde avait déjà fait assez de bruit comme ça, il ne voulait pas en rajouter. Du moins, c’est ce que se plaisaient à raconter ses parents à leurs amis quelques jours plus tard, fiers et heureux avec ce nouveau-né qui ne se plaignait jamais. En effet, Khaleb n’était pas de ces enfants qui veulent constamment attirer l’attention sur eux. Il ne pleurait que très rarement, et savait prendre son mal en patience. Qu’il ait un mois ou un an, cela ne changeait rien, il restait ce même petit chérubin curieux du monde qui l’entourait, qui souriait et gazouillait en regardant sa mère, et qui ne piquait jamais de crises, même si personne ne s’occupait de lui pendant de longs moments. Mais à vrai dire, il n’avait pas vraiment sujet à se plaindre. Sa chère mère lui était particulièrement dévouée, l’observant toujours d’un œil bien veillant, s’extasiant depuis ses nouveaux progrès, ses premiers pas, ses premiers mots. Elle était là, tout le temps, à ses côtés, ou du moins jamais trop loin, lui parlant, lui fredonnant des chansons, lui décrivant le monde comme elle le voyait. Elle lui parlait aussi beaucoup de son mari, peu présent quant à lui, mais pour qui elle avait une très grande affection. Elle racontait à Khaleb comment le père de celui-ci avait un jour dompté un dragon et travaillait maintenant au service du roi en chevauchant cette impressionnante créature dangereuse. Elle inventait des histoires fantastiques, pleines de rebondissements et d’aventures, qui berçaient l’enfant dans un monde de rêves chevaleresques.
Si son père était peu présent à cause de ses responsabilités, il n’était pas pour autant complètement absent. Tous les dimanches, il passait du temps avec son fils, et l’emmenait avec lui pour lui présenter son univers. Khaleb n’avait pas plus de trois ans la première fois qu’il chevaucha un dragon. Enfin, ce n’est pas vraiment lui qui le dirigeait, mais il était assis dessus, entre les jambes de son père, balloté solidement à la ceinture de celui-ci. Cette première fois, il eut très peur, et se cramponna de toutes ses forces aux écaillent, impressionné par le vent qui frôlait son visage, par cette sensation d’apesanteur, par la vue qui s’offrait à ses yeux, la vitesse, l’hauteur, la pression, etc. c’était une expérience unique, effrayant ais vivifiante. C’est pourquoi il voulut réessayer. Encore et encore. Et très vite, il en oublia la peur, et pouvait apprécier pleinement ces instants d’intimité avec son père et cette créature fantastique qui ne semblait même pas se soucier de la présence d’un petit garçon sur son dos. Pendant plus d’un an, ces dimanches à voler avec son père furent l’époque la plus belle de sa vie. C’était un jeu pour lui, un jeu extraordinaire où plus rien n’avait de sens ni d’importance, où il se sentait pousser des ailes et où il se croyait capable de tout. Un jeu époustouflant où il se sentait libre, où il se sentait lui-même puissant.

Grandir, apprendre, devenir.


« On ne chemine jamais qu’entraîné par la force de son naturel. » Nicolas Machiavel

Les années qui suivirent devinrent moins amusantes, mais beaucoup plus enrichissantes. Car, en grandissant, des responsabilités nous incombent, des droits, certes, mais aussi des obligations. Surtout quand on a le don. Car, oui, avec un père dragonnier, le jeune brun avait de fortes chances de devenir à son tour dompteur de dragons, et le don ne l’épargna pas. C’est pourquoi, dès son plus jeune âge, il fut formé pour répondre à sa soit disant destinée. A vrai dire, Khaleb ne croyait pas vraiment à ses histoires de héros et de destins. Mais, bercé de toutes ces histoires fantastiques que lui avait racontées sa mère quand il n’était encore qu’un poupon, il nourrissait ce rêve secret de devenir comme son père, d’être brave et courageux, et, par-dessus tout, de ne faire plus qu’un avec l’une de ces incroyables créatures qui pouvaient défier les lois de la gravité. Alors, bien que son entraînement fut dur, il y mit le meilleur de lui-même, s’efforçant jusqu’à l’épuisement total. Avec le temps, il gagna en résistance, et sa détermination restait inébranlable. Il endurait toutes les épreuves sans jamais se plaindre ni s’avouer vaincu. La défaite ne le décourageait pas, et la difficulté ne l’effrayait pas. Il passait des heures à s’entraîner seul, répétant plusieurs fois le même parcours du combattant, rampant, escaladant, courant, etc. Il s’était aussi construit un mannequin en paille avec lequel il répétait des mouvements d’épée. Cette arme blanche était d’ailleurs le domaine dans lequel il excellait particulièrement. Si cette lame d’acier avait été un défi à relever au départ à cause de son poids considérable, il la maniait à présent avec une grande agilité, à tel point qu’entre ces mains, elle paraissait un vulgaire bâton que n’importe quel enfant aurait pu soulever et faire tournoyer. Ce qu’il aimait par-dessus tout, c’était se battre avec les autres enfants de la cité. Car, si s’entraîner avec les adultes était très instructif, lutter à force égale était plus un jeu, une sorte de défouloir ludique.
Plus les jours passaient et plus il attendait avec impatience le jour où il pourrait faire ses preuves, mettre en pratique tout ce qu’il avait appris durant toutes ces années. Mais les années défilaient lentement. Alors, pendant ce temps, il avait aussi profité un peu de sa vie d’adolescent, séduit quelques filles avec lesquelles il ne vécu pourtant pas une très longue histoire, noué de profondes amitiés, et appris les rudiments de la vie à travers des déceptions amoureuses, des désirs bridés et des côtes cassées. Mais tout ce qui ne tue pas nus rend plus fort, et ce bébé qui ne se plaignit presque jamais finit par devenir un beau jeune homme plein d’entrain et de détermination, un garçon la tête pleine de rêves, fidèle à ses proches, dévoué, attentionné, un futur dragonnier vaillant et imperturbable, avec le cœur sur la main, doté d’un instinct en lequel il dépose toute sa confiance, une personne fiable, qui répond de ses actes mais qui refuse de se plier aux ordres d’un autre. Bref, une personne encore bien jeune et peu expérimentée, encore un peu naïve, qui a de beaux idéaux mais qui n’a pas encore réalisé à quel point la vie ne nous apporte par toujours ce que l’on désire.

Être un homme, être un dragonnier


« Il n'y a que deux conduites avec la vie : ou on la rêve ou on l'accomplit. » René Char

17 ans. Voilà le moment qu’il avait attendu toute sa vie. Le moment où ses rêves allaient devenir réalité. Ou alors le moment où il allait mourir pour et avec ses rêves. Dans les deux cas, il se sentait prêt, prêt à accomplir un objectif qui le hantait depuis la première fois qu’il avait chevauché un dragon. Aujourd’hui, il allait dompter un dragon. Mais pas n’importe quel dragon. Son dragon. C’était un évènement sans égal, le but d’une vie entière qui allait se réaliser. Il n’avait pas réussi à trouver le sommeil. Toute la nuit, il avait guetté l’aube, les yeux rivés sur sa fenêtre, contemplant l’imperceptible déclin de la lune, et enfin, les premières lueurs cramoisies qui émanaient depuis l’horizon. C’était son jour. C’était aujourd’hui que tout se jouait, que tout cet acharnement depuis sa plus tendre enfance trouvait un sens, une récompense.
Le soleil n’avait pas encore pointé le bout de son nez qu’il était déjà debout, l’épée rangée dans son fourreau, prêt à faire ce pour quoi il s’était si durement entraîné. Quand il franchit la cuisine, sa mère lui lança un regard timide, et il ne put s’empêcher de constater que ces yeux étaient emplis de larmes. Il savait à quel point s’était difficile pour elle, laisser son unique fils aller combattre un dragon qui pourrait tout à fait le tuer. Mais elle ne dit rien ; elle comprenait. Et il lui en était très reconnaissant. Son père quant à lui le regarda avec un sourire fier ; il ne s’inquiétait pas pour son fils, il avait parfaitement confiance en ses capacités. C’est donc dans le silence qu’il sortit de chez lui et se dirigea vers les cascades d’Eassanna Do. Il était encore très tôt, et seuls les bruits des animaux de la vallée résonnaient à ses oreilles. D’un pas décidé, il escalada la colline jusqu’à arriver au sommet du rocher où plusieurs dragons, déjà en éveil, paraissaient comprendre que quelque chose allait se passer. C’était la première fois que Khaleb en voyait autant réunis. Il y en avait de toutes les couleurs et de toutes les tailles. C’était impressionnant, et quelqu’un de sensé serait parti en courant. Soudain, un gigantesque Roi-du-Ciel se redressa sur ces deux imposantes pattes. C’était comme si la nuit venait à nouveau de replonger les cascades dans l’obscurité. Il aurait pu le combattre. Il aurait pu le dompter. Mais il n’était pas venu là pour lui. La créature dut le sentir, car elle déploya ses immenses ailes et les fit battre pour s’en aller, si puissamment que le jeune homme du s’accrocher de toutes ses forces à la paroi poreuse pour ne pas être projeté dans le vide. La vue maintenant déjà, il repéré presque aussitôt sa raison d’être : un gueule bleue, avec ses somptueuses écailles argentées. Cela faisait des années qu’il l’observait survoler la contrée, avec une majestuosité impétueuse. Dragon et homme se scrutèrent quelques instants en silence, se testant mutuellement. Et, brusquement, un froissement d’ailes à vous couper le souffle indiqua le départ des autres créatures et le début du combat.
Ce fut une lutte acharnée, une bataille extrêmement épuisante qui s’annonçait perdue d’avance pour le jeune homme. Et pourtant, il y parvint. Le visage ruisselant de sueur et une large plaie béante sur son torse, il était bien là, victorieux, debout sur le dragon, qui s’inclinait depuis celui avec lequel il était maintenant lié pour la vie. Désormais, Khaleb était véritablement un homme. Plus que ça, il était un dragonnier. Et il allait enfin voler avec son propre dragon. Avec Helanidd pour être plus exacte, une jeune dragonne fière et intelligente, rusée et téméraire, qui désormais ne vivrait que pour son dragonnier.

Vivre, faire vivre, et survivre.


« Tout ce qui augmente la liberté augmente la responsabilité. » Victor Hugo

Les années passent inexorablement, les choses suivent leurs cours. On grandit, on évolue, on change, on reste les mêmes. Qu’est devenu Khaleb après toutes ces années ? Un homme de 28 ans, qui ne rend de comptes à personne sinon à lui-même, un vaillant soldat qui lutte pour protéger les gens des créatures de l’enfer. La mort a refroidit son cœur. Toutes ces pertes, ces morts, cette guerre qui n’en finit plus, le danger, toutes ces vies qu’il doit prendre, la sienne aussi, qui chaque nuit risque de s’éteindre. Toutes ces choses qui font que, depuis cinq ans maintenant, il a perdu le sourire. Lui, ce garçon si joyeux, il se dévoué à la cause des autres, en oubliant parfois de prendre soin de lui-même. Il n’a pas peur de mourir, ni même de souffrir. Il n’a pas peur pour lui mais pour les autres. Peut de ne pas être à la hauteur, de ne pas pouvoir les sauver. Voilà à quoi il s’est dédié toutes ces dernières années : aider les autres. Mais cet altruisme finira par le tuer. S’il en est conscient, il ne veut pas l’admettre. Voilà où en est Khaleb à présent. Un homme avec le cœur sur la main, un vaillant soldat qui repousse sans cesse ses limites et qui en oublie de vivre, d’être heureux. D’aimer. Solitaire, sa seule compagnie demeure sa dragonne, cette brave créature qui, comme lui, donnerait sa vie pour au autre. En l’occurrence, pour lui.

Et pour les crédits c'est par ici

BIENVENUE
Ah Jason. Je suis justement en pleine séance de visionnage de Roswell
J'adore ta fiche Il y a quelques fautes d'étourderie mais rien de méchant (je vois que je ne suis pas la seule à ne pas me relire )
Juste, avant de valider, j'aimais vérifier un truc : l'inventaire est-il terminé ? Car je vois un "†" vide donc je me demande si ça n'est pas un oubli.