Jezabel LOCHLAINN —

L’Académie des Officiers se dressait devant elle de toute sa hauteur. Le vent faisait virevolter ses cheveux autour de son visage et ses grands yeux gris observaient avec attention chaque morceau de bois, chaque fenêtre que comportait l’édifice. Le ciel d’un bleu éclatant lui donnait une visibilité complète et elle admirait chaque détail, se nourrissant de cette atmosphère, espérant secrètement pouvoir en visiter l’intérieur un jour. Le bruit d’un cor de chasse retentit et elle courut se mettre à l’écart, derrière un buisson. Bien vite, la terre trembla sous les pas des soldats qui avaient eu l’honneur d’être sélectionnés pour entrer dans cette prestigieuse académie. Les nouveaux venus arrivaient et un sentiment de joie emplit l’enfant. Leurs casques rutilants, des épées somptueuses à leur côté et une armure de toute beauté. Si seulement elle pouvait être à leur place ... Elle n’était pas la seule à regarder ; plusieurs femmes du quartier s’étaient déplacées pour admirer le physique plutôt avantageux des jeunes hommes qui se succédaient devant elle. Jezabel n’en avait que faire, trop concentrée sur les armes, sa passion. Malheureusement, ce ne fut que l’affaire de quelques minutes et bientôt, le rêve s’envola. Se redressant sur ses deux jambes, elle regarda d’un côté, puis de l’autre, et releva le capuchon de sa cape sur ses cheveux blonds, qu’elle avait déjà longs. À pas furtifs, elle fit le tour de la bâtisse dans l’espoir de trouver un coin depuis lequel elle pourrait apercevoir l’entraînement. En réalité, la seule solution était de grimper, grimper et encore grimper jusqu’à ce trou dans le toit. Depuis le haut d’une colline voisine, elle l’avait entrevu et depuis cherchait par tous les moyens de l’atteindre. Elle le sentait : aujourd’hui, elle réussirait. Sa besace en cuir, de piètre qualité, contenait une paire de gants trop grands pour elle, qu’elle enfila tout de même. La petite fille recula de quelques pas, prit de l’élan, courut et sauta le plus qu’elle pouvait, se rattrapant à l’un des morceaux de bois. Par chance, personne ne l’avait vue — personne ne la voyait jamais. Grimaçant sous son propre poids, elle trouva des prises pour ses pieds et entama une ascension pénible, mais volontaire. Parfois, les fameuses « prises » cédaient, mais elle se contentait de redoubler d’efforts, heureuse d’échapper aux échardes qui auraient pu se ficher dans ses mains. Une dizaine de minutes plus tard, elle atteignit le haut du toit, passa une jambe, puis l’autre et réussit à se tenir debout un instant, histoire de faire le point. Parcourant le paysage à 180°, elle fut ébahie devant tant de beauté. Elle croyait distinguer une montagne au loin, mais ... Rien n’était moins sûr. Elle monta la pente qui la séparait du fameux trou et, quand elle fut au bout de son périple, un grand sourire s’étira sur son visage, témoignant de sa joie de n’avoir point échoué. À 10 ans, Jezabel savait très bien ce qu’elle voulait et l’obtenait toujours. Les gens du quartier la considérait simplement comme une indigente de plus, une enfant mal élevée que son père laissait se balader n’importe où sans surveillance. Ils partaient du principe qu’un gamin sans mère allait forcément mal tourner, surtout une fille. Effectivement, dans la merveilleuse cité de Cathairfàl, l’éducation avait une grande importance : les jeunes filles devaient apprendre la politesse, la couture, bref, toutes ces choses que les hommes détestaient faire, ces choses futiles et inutiles. Nicholas Lochlainn voyait tout à fait autre chose pour le produit de sa chair. Morte à la naissance du bébé, sa femme avait un esprit indépendant, révolutionnaire et il ne doutait pas que Jezabel en aurait hérité. Très vite, ses intuitions se confirmèrent. L’enfant courait en tout sens, avait fortement tendance à désobéir et aimait « jouer à la guerre » avec les garçons des environs, qui la considéraient désormais comme l’une des leurs, après des réticences tenaces. Les préjugés ... Encore quelque chose contre lequel ce petit bout de femme se rebellait. Sachant qu’il était inutile de la brider, Nicholas la laissa libre de tout mouvement, tâchant toutefois de lui enseigner les rudiments de la vie en société, du savoir-vivre, tenant absolument à ce qu’elle sache se comporter en public. La franchise de Jezabel lui avait plus d’une fois joué des tours, mais tel le chat, elle retombait toujours sur ses pattes.

Jetant un œil par l’ouverture, elle capta quelques paroles, probablement du directeur de l’Académie. Elle trépignait d’impatience, les longs discours étant plus ennuyeux qu’instructifs. Quelques soldats piquaient du nez, mais faisaient bonne figure. Un homme fit son apparition, grand, un air malicieux sur le visage, une aura de puissance émanant de lui. Il prit place devant les « élèves », parcourut la foule du regard, un petit sourire sur les lèvres. « Bienvenue dans cette Académie. Comme le directeur vient de vous le dire, nous ne sommes pas ici pour rigoler et j’attends de vous discipline, obéissance et respect de vos supérieurs et de vos égaux. L’entraînement commence dès maintenant. Taisez-vous ! Vous apprendrez ici que personne n’a le droit de se plaindre, sinon, vous pouvez retourner chez vous dès maintenant. Je ne laisserai rien passer, ne vous fiez pas à mon air sympathique et à mes belles manières. S’il y en a un qui ouvre la bouche quand il n’y est pas autorisé, qui montre des faiblesses indignes d’un soldat du roi ... Il sera renvoyé, c’est compris ? ». Le silence régnait dans la salle et Jezabel souriait. Il lui plaisait, cet homme ; il savait ce qu’il voulait, il savait se faire respecter et elle s’imaginait à sa place, des hommes lui obéissant aveuglément, faisant d’eux ce qu’elle désirait. « En place ! Que ça ne traîne pas ! ». Les élèves firent ce qu’il leur disait et de nouveau, silence pesant. Un rire s’échappa de la bouche de la petite fille ... Et retentit dans la salle du dessous. Elle plaqua machinalement sa main sur ses lèvres, mais avant qu’elle ait eu le temps de se cacher, certains levèrent la tête vers elle et la désignèrent du doigt. L’instructeur suivit les regards et son visage s’empourpra. Qui osait l’interrompre ? «Toi là-haut ! Descends tout de suite ! Attends que je t’attrape ! ». Jezabel se remit sur ses pieds, se précipita vers le bord du toit et fit le même chemin que précédemment, en sens inverse, trébuchant au passage. Les pas se rapprochaient et, à mi-chemin, elle tenta le tout pour le tout, lâcha les prises et tomba ... Roulant sur le sol, elle se releva ; par miracle, pas même une cheville foulée. Se retournant, elle vit trois hommes qui fondaient sur elle. Son capuchon toujours sur la tête, elle courut aussi vite qu’elle le pouvait. Leurs armures les ralentissaient et elle se faufilait entre les jambes des villageois avec habileté. La petite fille les sema, mais pour se rassurer, elle se réfugia en haut d’un arbre, hors de portée et, comme un caméléon, passant totalement inaperçue. Sous elle, les trois hommes s’étaient arrêtés et regardaient autour d’eux. Chacun partit dans une direction différente, sur ordre du chef. Les hommes étaient-ils donc tous si stupides ? Levant les yeux au ciel, Jezabel remercia les nuages d’être une fille.

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Je vais tâcher de finir ma fiche aujourd'hui, j'ai un peu de temps

Me souhaiter la bienvenue un jour après que j'aie posté ma fiche, ce n'est pas un retard
Merci beaucoup