Echo des Plaines : Chapitre VII ▬ Le Retour d'Inasmir


 
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 Sweet dreams are made of this | Vigdis

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MessageSujet: Sweet dreams are made of this | Vigdis    Sweet dreams are made of this | Vigdis  EmptyDim 22 Avr 2012, 23:47

Pour déambuler dans les rues de Port-aux-Princes, Lilith eut pu faire preuve de discrétion. Abandonner ses parures coûteuses et ses tenues luxueuses pour l'anonymat des tenues des femmes du commun. C'eut été trop lui demander. C'eut été imposer à la jeune femme de s'humilier pour ne pas frapper l'imagination des Singuliers, ne pas se faire remarquer. Toutes choses dont la Pythie des Héritiers se moquait éperdumment. Elle n'avait pas enduré le froid, la dégradation de tout son être et le contact de la Mort pour devoir adopter une attitude plus humble lorsqu'elle sortait en ville, poussée par l'inspiration divine et macabre d'une de ses visions d'apocalypse. Ce jour-là pourtant, Lilith avait fait dans la sobriété. Plutôt que de surcharger sa personne de babioles clinquantes et hors de prix dont la simple vente aurait suffit à nourrir un village pendant une année, elle avait sobrement opté pour un lourd bracelet en bronze terni, sombre, et une robe dont les couleurs reproduisaient à la perfection la teinte grise, métallique, la couleur de plomb adoptée par les flots de la mer ce jour-là. Malgré l'été, le ciel restait bas et la journée ne serait pas belle, la jeune femme le savait. À force de vivre si près de l'océan, elle avait développé une certaine empathie avec ses humeurs. Elle avait émergé de son lit ce matin-là consciente que de la journée, on ne verrait pas le soleil. Pourtant l'air restait doux et même dans cette robe légère, la devineresse ne ressentait pas le froid. Accompagnée par son garde du corps, éternel colosse silencieux, elle avait entamé sa descente vers les bas quartiers de la ville, vers ses quais qui sentait le poisson, la crasse et la sueur dans un seul but. Suivre le parfum d'une vision. L'image d'une fille-fleur aux cheveux d'ivoire esclave d'un équipage pirate qui mourrait noyée, engloutie dans le grand cercueil liquide de Darya lors d'une tempête. Pour un naufrage de plus, Lilith n'aurait d'ordinaire pas pris la moindre initiative. Elle se serait assise sur sa couche pour exulter d'une joie malsaine. Mais ce navire avait à son bord une personne que la jeune femme ne pouvait laisser mourir sans regret. Une Pythie. Une Pythie prisonnière de la domination de ses maudits Singuliers. La jeune femme rousse ne pouvait pas la libérer, l'arracher à ses geôliers mais elle pouvait empêcher les serres de la mort de se refermer sur son âme. Tôt ou tard, les Héritiers étendraient leur influence sur tout Lanriel et elle serait libérée. Mais pour ça, elle devrait être en vie. Elle devrait être prête. Aussi la jeune femme traversait-elle la cité d'un pas tranquille pour accomplir sa tâche et prêcher la bonne parole à cette inconnue. Elle ne connaissait après tout même pas son prénom. Mais elle savait qu'elle serait là. Sa vision avait été suffisamment détaillée pour qu'elle en soit certaine.

La vision lui avait donné une impulsion muette à laquelle elle n'avait jamais pu se soustraire. Le message bien qu'implicite en était clair. Rends-toi sur le port. Aujourd'hui. Sans délai. Ou tu la perdras. Elle ordonna à son reître de rester quelque pas en arrière et de n'intervenir que si le danger se précisait. Dans le cas contraire, elle ne voulait même pas remarquer sa présence. Hochant la tête affirmativement, l'homme avait reculé à la limite de son champ de vision et s'était fait oublier. Il l'avait laissé virtuellement seule dans sa chasse, dans sa traque où elle parcourut les pavés perpétuellement poisseux du port dans l'atmosphère aux arômes de marée comme si elle s'était trouvée dans la salle d'apparat d'un quelconque palais. Et soudain, elle l'aperçut. La fille de ses visions. La devineresse dont la chevelure avait la couleur de l'écume. Elle avisa aussi les marins qui descendaient du navire auquel elle appartenait et décida d'attendre qu'ils se fussent quelque peu dispersé. Finalement, lorsqu'elle se fut assurée que personne ne pouvait interrompre leur conversation, elle traversa l'espace qui les séparait encore en l'espace d'un battement de cœur. Elle rallia sa cible en quelques pas, rapides mais gracieux, félins presque, pour poser sa main délicate, rendue douce et belle par les soins attentifs dont elle entourait sa personne, sur l'épaule de la jeune femme. D'une voix accorte, rassurante, elle se présenta à son interlocutrice. « Pardonne-moi, mon amie. Je suis Lilith Dagan. Nous partageons toutes les deux la même particularité et je suis venue t'avertir de ce que le Destin m'a murmuré cette nuit. Ce ne sont pas de bonnes nouvelles et elles te concernent. Veux-tu bien m'accompagner à la Taverne ? Nous y discuterons plus à l'aise que sur cette place à la merci des éléments. » Elle savait qu'en l'abordant de cette façon, elle avait une chance d'obtenir son attention. Et de ne pas éveiller sa méfiance. Après tout, leur conversation resterait dans un endroit parfaitement public, à deux pas du bâteau de ses maîtres. Presque sous leur regard. Ainsi ferait-elle preuve d'une franchise toute calculée mais qui, elle l'espérait, porterait ses fruits. Elle attendit patiemment la réaction de la demoiselle, son visage tout entier affichant une expression de douceur et de compassion sur laquelle elle avait au fil des ans beaucoup travaillé...


Dernière édition par Lilith Dagan le Sam 19 Mai 2012, 23:03, édité 2 fois
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Vigdis Luderik

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MessageSujet: Re: Sweet dreams are made of this | Vigdis    Sweet dreams are made of this | Vigdis  EmptyLun 23 Avr 2012, 18:05

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Les rêves. Quoi que l’on puisse en dire, qu’importe ce à quoi nous pouvons croire, les rêves restent universels, et portent tous en eux une part de vérité. Juste un peu, mais assez pour que tout le monde puisse éprouver un tant soit peu d’espoir. Cet espoir d’évasion qui vous donne l’impression éphémère que le monde dans lequel on vit finira par être meilleur, juste un peu d’espoir qui vous fait vivre encore et encore. Mais pour tous les devins,
rêver n’est pas du tout de la même dimension que pour le commun des mortels, l’imagination n’est pas de mise, l’espoir se mêle au désespoir, et c’est en témoin des événements futurs qu’ils se posent. Témoin d’un futur hypothétique, d’un passé révolu, et d’un présent au bord du gouffre. Les devins ne rêvent, certes, mais l’imagination n’a pas sa place dans leurs songes, ils sont ceux qui jouent avec les fils du destin, les dénoues pour finalement rester impuissant face à des forces qui les dépassait de loin, de très loin. La seule chose qui était en leur pouvoir restait la prévention, hurler à qui voudrait l’entendre qu’un grand danger allait bientôt s’abattre sur eux, sans avoir la certitude, qu’au dernier moment, aux aléas d’un nœud gordien tout changerait. Mais qu’importait, mieux valait prévenir que guérir.
Et c’était en partant de ce principe qu’elle avait informé, il y avait de ça deux jours, après un rêve de tempêtes, le capitaine du navire. Se fiant à son intuition, et au rythme des vagues qui laissait à penser que bientôt la mer serait démontée, ils avaient pris la direction du port le plus proche, celui de la ville de Port-Aux-Princes. Mais après deux jours d’attentes, les hommes commençaient à se languir de la mer, et le temps, quant à lui ne s’était toujours pas mué en cette terrible tempête qu’elle avait entrevue dans ses songes. Le ciel était bas, gris, presque noir, le vent avait fini par se lever, mais il n’y avait pas la moindre trace d’une quelconque tempête, pas même une once de pluie. Bien sûr, le temps menaçant laissait à penser que cela arriverait à un moment ou un autre, mais l’équipage ainsi que le capitaine, avait décidé de reprendre la mer dès le lendemain si aucun changement ne venait à se produire. Cette perspective avait tout d’effrayante, mais ils s’étaient jugés assez bon pour mener le navire au travers d’une tempête qui ne semblait pas vouloir se faire sentir. Et quelle juge cela comme une grave erreur n’aurait aucune incidence sur l’équipage, ils n’avaient jamais eu besoin que de son avis à titre préventif, et c’était à présent contre ce même avis qu’ils s’étaient posés.

Alors, assise sur la bord du pont, laissait seule sur le navire, elle avait posé ses yeux sur le lointain, imaginant bien qu’une fois de plus le destin aurait changé de direction, que le temps viendrait à se lever et que le soleil percerait les nuages noirs. Mais l’espoir se faisait infime, aussi infime que ça peur pouvait être grande. Vigdis n’avait jamais fait preuve de courage, alors la mort était quelque chose qui l’effrayait au plus haut point, ça et la pensée même qu’elle ignorait tout de ce qu’il pouvait y avoir après cette fin de vie. En somme, pour un devin, ça n’avait rien d’étonnant, toujours tout connaitre de tout, et finir par tomber sur quelque chose dont on ignorait tous les fondements, c’était particulièrement intrigant mais autrement plus terrifiant. Poussant un soupir, elle se détourna tout aussi soudainement de cette vision houleuse et qui pourtant restait inchangée depuis des jours. Volteface, et ses cheveux platines se collent à ses lèvres dans une bourrasques de vent, mouvements à peine entravée, elle entrevoit au travers de ce fouillis capillaire le visage gracieux d’une femme. Réalité ou simple fantasme ? Sur l’instant elle n’aurait su le dire, puis le vent tombe, et d’une main peu habile, elle s’affaire à tout replacer derrière ses oreilles. La vue dégagée, elle pouvait à présent, se rendre compte que cette présence qu’elle n’avait jusqu’alors fait qu’entrevoir n’était pas un mirage, mais une réalité. Déboussolée par cette vision impromptue, elle se demandait encore comme réagir, quand celle-ci se mit à lui parler. Cette inconnue, avait une voix et une façon de s’exprimer qui la fit se sentir toute petite, si démunie… Et dans sa façon de se mouvoir, de la toucher, il y avait cette prestance, cette petite chose, qu’elle n’aurait jamais. Il était presque frappant, oui, si douloureux de se rendre compte de son insignifiance, de son très simple statut d’esclave.
Hésitante, et se sentant rougissante, elle ne se sentait pas à l’aise en compagnie de ce genre de personnage. N’arrivant pas même à soutenir son regard, elle se contentait de planter son regard sur les planches du pont, se laissant le temps d’une seconde hypnotisée par le mouvement des pans de sa robe dans le vent. Pourtant, il n’y avait pas lieu de douter, et mieux valait se ranger du côté de l’insouciance, la suivre pour s’enquérir de ce qu’elle avait pu voir, et qu’elle –même n’avait pas su déceler au travers de ces visions prémonitoires. Alors, dans une hésitation finale, elle ne finit pas acquiescer d’un rapide hochement d’approbation de la tête.
Remontant, la capuche de son capuchon sur sa tête, elle fit signe à sa nouvelle compagne de prendre la tête du cortège, elle ne connaissait que trop peu la ville, et ne savait quel genre d’établissement pouvait fréquenter cette demoiselle, qui été autrement plus digne qu’elle. Cependant, même si elle s’était résignée à la suivre, elle se demandait pourquoi une femme aussi élégante pouvait porter un tant soit peu d’attention à une pauvre esclave qui n’avait jamais fait qu’entrevoir le futur pour un groupe de pirates. Alors, sans y réfléchir, elle s’arrêta net avant de prendre la parole.

« Pourquoi… Pourquoi venir me voir ?! Enfin… Je vous remercie de vous soucier de moi, mais pourquoi ?! »

A peine ces mots eurent franchis sa bouche, qu’elle se rendit compte que toutes ses questions auraient très bien pu attendre, que ça ne servait à rien d’assener cela en pleine rue… Mais il était à l’évidence un peu trop tard pour s’en rendre compte.
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MessageSujet: Re: Sweet dreams are made of this | Vigdis    Sweet dreams are made of this | Vigdis  EmptyMar 24 Avr 2012, 00:22

Comme dans sa vision, la jeune prisonnière enchaînée à ce navire puant semblait fragile, éthérée, tout droit issue d'un autre monde. Lilith ne pouvait laisser ses yeux clairs, bleu azur et jaune soleil, être voilés par la noyade. Presque indépendamment de sa nature de devin, sa beauté avait quelque chose de tragique qui aurait pu pousser la Pythie à agir de toute façon. Aurait pu. Il était difficile de se résoudre à laisser une telle œuvre d'art humaine devenir charogne. Parfois, en de très rares cas, la jeune femme se sentait coupable de ne rien faire lorsque ses visions concernaient des Singuliers qui lui paraissaient mériter autre chose que son mépris. Pourtant elle n'avait jamais agi. La fille ne sembla pas s'effrayer de cette entrée en matière prouvant qu'elle était bien l'être que l'Héritière recherchait. L'esprit des devins ne se brisait pas en présence de la fatalité. Il ne se fissurait pas pour éclater en fragments sous l'effet des présages et des augures. Lilith avait toujours eu horreur de cette habitude qu'avaient les plus faibles d'éclater en sanglots ou de la supplier lorsqu'elle leur annonçait qu'elle avait vu l'imminence de leur propre trépas. Son envie de les aider tombait au plus bas puisqu'elle avait remarqué qu'en général, ils ne survivaient pas. Ils manquaient du courage, de la volonté de survivre contre toute attente nécessaire pour affronter la Faucheuse dans son manteau d'obscurité. Au lieu de s'effondrer, la prisonnière des corsaires lui fit signe de la précéder pour la guider loin du bâteau. Le sourire de la jeune femme s'élargit. Son plan était en bonne voie et tout se déroulait dans les meilleures circonstances. Si cela continuait ainsi, Lilith pourrait rentrer chez son riche mécène avec la satisfaction du travail bien fait. Elles venaient de faire quelques mètres pour s'écarter du navire lorsque la voix de sa cible lui parvint, interrogatrice. Ignorante de sa propre valeur, elle s'interrogeait sur les motivations qui l'avait poussé à intervenir... De ses yeux clairs, elle considéra son interlocutrice, sa fragilité manifeste, se gonflant du sentiment de toute puissance qu'elle avait acquis au fil des années, explorant les différences qui existaient entre leurs deux conceptions du monde, de leur personne. La jeune femme était un outil à la solde d'une bande de soudards qui l'utilisait sans doute depuis des années comme un compas mystique pour faciliter leur navigation au travers des marées du monde. Elle était un objet dont le cœur palpitait. A contrario, l'Héritière avait été recueillie par les siens, confirmée dans sa propre importance, rassurée sur la beauté de son pouvoir, son caractère exceptionnel. Toutes choses dont elle n'avait jamais douté. Elle avait appris avec le temps que tous ceux que les Dieux, et elle parlait de divinités au pluriel, avaient doté de capacités surnaturelles ne partageaient pas les mêmes certitudes à ce sujet. Certains tâchaient d'ailleurs d'enterrer leurs pouvoirs dans un petit coin de leur esprit, de les ignorer pour mener une vie terne au milieu de ces Singuliers qui les méprisaient. La surprise se peignit néanmoins sur les traits pâles de Lilith.

« Es-tu sérieuse ? Me demandes-tu sérieusement pourquoi je tiens à te sauver la vie ? C'est une situation inédite. Voilà qui ne m'était jamais arrivé auparavant. » Ce n'était pas tout à fait un mensonge. Après tout, les gens ne lui demandaient généralement pas pourquoi elle cherchait à leur sauver la vie mais pourquoi ne préférait-elle pas garder le silence. Certaines personnes préféraient ne pas savoir le moment de leur trépas. C'était une conception que Lilith pouvait respecter même si elle ne la comprenait pas tout à fait. Il y avait une certaine dignité dans ce renoncement à la connaissance du futur, de sa propre destinée. Au moins ne s'effondraient-ils pas comme de lamentables loques... Elle secoua la tête, renonçant au confort de la taverne pour commmencer cette conversation.« Je viens te voir parce que mes visions m'ont prévenue que toi et l'équipage de ce raffiot alliez prochainement périr dans la tempête qui s'annonce. Parce que c'est ce que je fais. J'avertis les gens du danger qui les guettent pour qu'ils puissent changer leur destin. » Exposé de cette façon, les actes de Lilith avaient presque l'air noble. Elle passait sous silence volontairement qu'elle ne prévenait jamais les Singuliers concernés par ses augures mais qu'au contraire, elle se gorgeait de leur trépas prochain. Ici elle leur sauverait la vie uniquement car elle ne pouvait faire autrement. Eut-elle pressenti chez son interlocutrice la moindre trace de haine homicide qu'elle lui offert l'asile sur le champ. Mais sa vision ne lui avait rien montré de tel et elle devrait attendre qu'elle en exprime le désir. Ce dont, elle se doutait, n'interviendrait pas maintenant à leur première rencontre. Ceux dont les Singuliers avaient détruit l'estime ne se montraient généralement pas avides de vengeance les premiers temps. Il s'agissait de réveiller chez eux le sentiment de l'injustice. De leur montrer les torts qu'on leur avait infligé. Elle ne doutait pas que trouver un angle d'attaque ne serait pas compliqué en ce qui concernait la jeune devineresse blonde. « Je manque à tous mes devoirs. Je me suis présentée mais je ne connais même pas ton nom. Peux-tu me le dire ? Je pense que notre conversation sera plus facile si nous savons toutes deux à qui nous avons affaire... » Ayant renoncé à guider la jeune femme où que ce soit tant qu'elle n'aurait pas clarifié la situation, calmé ses doutes et rassurée sur ses intentions. Elle aurait pu la dénoncer, livrer aux autorités le nom du bateau pirate qui mouillait dans leur rade juste sous leur nez mais elle aurait gâché ses chances de gagner sa confiance dans les meilleures conditions possibles. Il serait toujours temps de s'occuper de ses pillards des mers par la suite. Le mieux étant encore que leur Pythie personnelle fut l'instrument de leur perte. Un tel acte propulserait immédiatement la jeune femme dans la société des Héritiers. Mais encore une fois, Lilith anticipait l'avenir et de loin. Cette conversation serait le prologue d'une histoire dont elle attendait beaucoup...
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MessageSujet: Re: Sweet dreams are made of this | Vigdis    Sweet dreams are made of this | Vigdis  EmptyMar 24 Avr 2012, 12:43

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Elle n’était pas la première devineresse qu’elle rencontrait. A dire vrai, elle en avait peut-être rencontré plus que la plupart des habitants de ce monde, les pirates étant friands du don de clairvoyance, ils semblaient apprécier non pas leur compagnie mais bel et bien celle de leur don. Mais de tous les devins qu’elle avait un jour put avoir sur sa route, jamais aucun n’avait provoqué en elle cette sensation mêlant autant d’effrois que d’admiration.
Mais pourquoi avoir peur ?! Il ne semblait avoir aucune raison apparente, juste un frisson passager comme pour vous avertir instinctivement, ce même frisson qu’avec une certaine naïveté elle avait ravalé pour finalement l’oublier aussi rapidement qu’il était apparu. Puis l’admiration, comment aurait-elle pu passer à côté de cette femme sans la remarquer, elle ressemblait en tout point à toute ce que les petites esclaves dans son genre avaient un jour aspiré à devenir : un dame élégante, richement vêtue aux manières exquises. Autant dire que dans sa robe de bures et son capuchon miteux, elle faisait autrement pâle figure.
Oh certes, elle pouvait se donner de la contenance en tentant de se tenir aussi droite que l’était cette femme, mais quoi qu’elle fasse, quoi qu’elle dise, jamais dans sa façon d’être elle ne pourrait l’égaler, tout semblait être décidé d’avance. La fatalité était ainsi faite, et le destin ne s’occupait que rarement, si ce n’était jamais, des états d’âmes des devins, il se contentait de passer et de tout emporter. Et celui-ci, en mettant cette autre devineresse, cette Lilith Diagan, sur son chemin n’avait fait que piétiner sauvagement le peu d’ego qui pouvait lui rester. Et tenant d’une main ferme les pans, réunis, de son capuchon, elle attendait tout simplement que l’on vienne lui assener le coup final. Une simple évidence, qu’elle n’aurait pu déceler par sa plus simple ignorance.
Quoi que fut l’impression qu’elle eut pu avoir de cette femme, bonne ou mauvaise, ses propos quant à eux ne semblaient pouvoir trahir une quelconque vilenie. Et de ses yeux, comme par ses oreilles, Vigdis aurait pu jurer du bien fondé de ses propos, tout semblait être si bien orchestré qu’il n’y avait nul besoin de douter de la véracité de ses dires… Outrageuse naïveté. Il est pourtant des serpents qui crachent de fieffées sornettes sous le couvert de douces paroles, et il est de splendides paons qui savent par leurs atours vous cacher l’envie de vous pincer dès que vous aurez l’audace de les approcher. Beau diable, était cette femme, dont les talents d’oratrices n’avait n’équivalent que sa beauté et son rang… Et a ne pas en douter son pouvoir. Aussi innocente rester Vigdis, aux joues rosies, n’osaient toujours pas soutenir le regard de son interlocutrice. Et sa gêne transparaissait à tous, alors que ses doigts s’entremêlaient dans les coutures grossières de son capuchon. Serrant, et desserrant chaotiquement, juste pour calmer cette étrange timidité qui la rongeait.
Là, au milieu de la foule qui se dirigeait comme un seul homme vers le marché au poisson de la ville, elles semblaient être d’un autre monde. Préoccupées par d’autres choses que le futur immédiat, ou bien ce qu’elles allaient bien pouvoir manger et combien d’argent elles allaient pouvoir gagner en vendant le fruit de leur pèche. Pourtant, aussi loin pouvait se trouver leurs esprits, elles n’en restaient pas moins encrées à la réalité, et après un moment de silence, les mains de Vigdis se décroisèrent pour venir lisser des plis imaginaires, un moyen comme un autre de se débarrasser de cette impression flagrante d’infériorité. Puis finalement, comme dans un déclic inattendu, tous ces gestes quelque peu maniaques cessèrent, et ses yeux remontèrent vers le visage de la dénommée Lilith. Sans pouvoir encore la regarder dans les yeux, elle s’affairait à les garder river sur ses lèvres.

« On m’appelle Vigdis. J’ai eu un nom mais le temps l’a effacé. »

Phrase à peine murmurée, elle comportait à elle seule bien plus de honte que ce qu’elle aurait pu penser au moment où elles avaient franchi la barrière de sa bouche. Etre esclave c’était une chose terrible, on perdait toute humanité, et puis on finissait par oublier son identité. Et finalement ce prénom, Vigdis, ce n’était qu’une réminiscence d’une autre vie, un prénom qu’elle entendait parfois dans ses souvenirs, c’était la dernière chose qui la rattachait à son humanité, qui la différencier d’un animal utile à la vie de tous les jours, qui lui permettait de se voir autrement qu’en sa nature de devin.
Devin. De tous les devins qu’elle avait pu rencontrer, elle semblait être la première capable de répondre à ses questions, la première qui puisse lui répondre autrement que par un grognement ou par des mots pleins de folies. Alors oubliant pendant un instant sa honte, sa timidité, et se débarrassant ainsi de tellement de choses, se sentant plus libre, elle trouva la force de faire un pas de plus. Juste un seul pas de plus, la main en avant attrapant avec un mélange de délicatesse vis-à-vis de l’étoffe soyeuse et de sa propriétaire, ainsi que quelque peu d’empressement au sujet de ses questions.

« Vous… Vous êtes toujours ainsi ? Je veux dire… Quand vous avez une vision, vous le dîtes toujours ?! Vous ne préférez pas, la terre, et regarder si ce que vous avez vu se réalise réellement ?! Parce que moi… Enfin… Je crois que je ne suis pas quelqu’un de très bon, et j’ose penser, qu’en me donnant se pouvoir, la déesse s’est penché sur le mauvais berceau. »

Et pour la première fois, ses yeux se plantèrent dans ceux de sa nouvelle connaissance. Plein d’une certaine détresse, elle ne cherchait pas moins qu’un peu de soutient. Juste de quoi se rassurer sur sa façon d’être, simplement de quoi se dire, qu’au fond, elle n’était pas aussi mauvaise que cela, qu’elle était une humaine comme les autres.
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MessageSujet: Re: Sweet dreams are made of this | Vigdis    Sweet dreams are made of this | Vigdis  EmptyMer 25 Avr 2012, 15:30

A la vision de son embarras évident, Lilith eut un pincement au cœur et la compassion vint envahir son âme. La jeune femme ne semblait pas savoir comment réagir, quelle attitude adopter et ses gestes erratiques lui rappelait douloureusement le comportement compulsif d'un petit animal pris au piège. Les pirates, la vie au milieu de ces Singuliers vulgaires et brutaux avait transformé ce qui aurait du être une devineresse fière de ses pouvoirs, de sa puissance, de son utilité manifeste face aux légions d'humains dénués de dons occultes sans but ni importance, en une créature craintive, fuyante et apeurée. Elle retint un geste d'une pitié déplacée qui aurait pu vexer ou heurter la fierté de son interlocutrice, si tant est qu'elle n'eut pas été dépouillée jusqu'au dernier fragment par ses années de servitude forcée. Finalement son prénom jaillit de ses lèvres. Son prénom et une confession. Elle avait oublié son nom de famille. Elle l'avait oubliée ou quelqu'un l'avait contraint à laisser son identité au vestiaire. Tentant de ne pas se départir de son attitude avenante, l'Héritière se plut à imaginer les tortures qu'elle infligerait à chacun des hommes d'équipage quand le moment serait venu. À condition qu'il en resta un en vie. Ce serait à Vigdis, puisque tel était son prénom de livrer à la souffrance et à l'agonie ceux qui avaient été ses bourreaux. Un jour, Lilith verrait avec plaisir les huttes dans lesquelles elle avait grandi se consumer et entendrait les hurlements de douleur de la communauté qui l'avait rejetée mais pour le moment, elle devait se concentrer sur le cas de la Pythie blonde, pauvrement vêtue et encore plus pauvrement traitée. Chaque chose en son temps. La précipitation ne menait nulle part hormis dans les geôles de Cathairfál. L'exemple de Tanith Ruane était devenu un cas d'école maintenant utilisé pour montrer aux Héritiers les plus impatients ce qui risquait fort de leur arriver. Personne ne devait oublier qu'ils étaient encore une minorité et que pour rallier à leur cause leurs frères et sœurs d'infortune, ils devaient d'abord s'appliquer à leur monter toute l'iniquité de leur situation. C'est donc une Lilith parfaitement maîtresse d'elle-même qui sourit doucement à cette présentation peu protocolaire. « Merci Vigdis. Merci de me faire assez confiance pour m'écouter. Les moments où je rencontre une des compagnes de vision sont bien rares... » Cela n'était pas tout à fait vrai. Mais pas tout à fait faux non plus. Elle fréquentait essentiellement ceux que ses visions l'amenaient à côtoyer et la plupart du temps, les autres Devins veillaient sur leurs propres intérêts sans qu'il fut nécessaire qu'elle s'en mêle. Tout au plus chargeait-elle un autre membre de leur confrérie d'avertir l'intéressé lorsque ses visions concernaient un autre Oracle...

Leur entretien prit alors un tour inattendu. Inattendu mais exceptionnellement intéressant. Vigdis sortit brusquement de sa réserve, de sa timidité pour faire un pas vers elle, attrapant le pan de son vêtement pour lui poser des questions. Des questions de moralité. La jeune femme s'intéressait visiblement au fait que Lilith prétende faire part de toutes ses prémonitions aux intéressés et sembler avouer à demi-mots que ce n'était pas toujours le cas de son côté. Bien. Au moins avait-elle un terrain favorable à se montrer cachottière, laissant une marge de manœuvre bien supérieure à l'Héritière que celle qu'elle avait espéré jusque-là. Les pirates vivaient depuis des années avec une personne qui ne demandait que quelques bons conseils pour leur nuire gravement. Il suffirait de la débarasser des derniers relents nauséabonds de culpabilité qui flottaient autour de sa jolie tête pour que Lanriel enfanta une autre Prophétesse capable de guider ce royaume en perdition vers un avenir plus radieux et plus juste. Attrapant dans sa main parfumée la poigne salie par la vie en mer de son interlocutrice, Lilith se para de son plus beau sourire se préparant à tisser une nouvelle toile.

« Cela m'est arrivé. Et cela m'arrive encore, je ne saurais le nier. Il y a des vies que je ne préfère pas sauver. Des vies d'assassin, de parias et de malandrins dont les âmes noires ne méritent que de retourner à l'Enfer dont elles sont issues.» Elle jeta un regard plein de fiel au navire qui les surplombait. « N'eut été ta présence à bord, Vigdis, que j'eus laissé ce bateau couler corps et biens... Mais je ne peux pas. J'ai pensé prévenir la garde pour qu'ils arrêtent l'équipage. Mais tu aurais fait partie du lot et je ne veux pas te voir croupir dans une de leurs cellules. À la merci de leurs abjects hommes de main qui se prétendent gardes... » Ce n'était pas tout à fait la vérité mais pour avoir déjà visité ses geôles, Lilith savait que certains des soldats usaient et abusaient de leurs privilèges sur les prisonnières. Si elle-même y avait échappé par sa maigreur et l'éclat fou de ses yeux, elle savait que son interlocutrice avec son joli minois ne jouirait pas de la même chance. Les meilleurs mensonges étaient teintés de l'éclat cruel de la vérité toute nue, dépouillée de ses artifices. Consciente qu'il en faudrait plus à Lilith pour prouver qu'elle comprenait la situation de la jeune prisonnière, elle décida de livrer un peu de son histoire. « Je suis née sur les rives de Darya. Comme toi je suppose. Quand mon pouvoir s'est manifesté, j'ai rapidement découvert que mes visions ne concernaient que l'avenir et jamais des évènements heureux. Je vois les catastrophes, Vigdis. Chaque fois que les Dieux daignent m'envoyer un signe dans mon sommeil, je ne vois jamais que le trépas. Je suis condamnée à voir le malheur s'abattre sur le monde. Mes proches ont refusé ce pouvoir et m'ont demandé de taire mes prémonitions. En fille obéissante je l'ai fait. Lorsque le Bouclier est tombé et qu'ils ont réalisé que je l'avais vu, ils ont essayé de me tuer pour finalement me bannir. Sans l'aide généreuse des personnes qui m'ont recueillie, je serai morte. La révélation de l'avenir est un fardeau que nous portons toutes les deux. Nous sommes les juges que les Dieux ont choisi pour révéler ou taire ce que l'avenir réserve. Aie confiance. Ce pouvoir ne te serait pas venu si tu n'en avais pas été jugée digne...» Elle n'avait pas évoqué Eydis. À aucun moment. Elle préférait parler des dieux au pluriel qu'évoquer cette déesse catin qui n'avait pas répondu à ses appels alors qu'elle se mourrait dans la rue. Elle posa une main rassurante sur son visage dans un geste de compassion. « Tu sembles te poser de nombreuses questions sur notre pouvoir commun. Y a-t-il autre chose que tu aimerais savoir ?»

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MessageSujet: Re: Sweet dreams are made of this | Vigdis    Sweet dreams are made of this | Vigdis  EmptySam 28 Avr 2012, 01:35

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Elle regretta presque immédiatement son geste, pensant surement que poser ses mains usées par les travaux de coutures au niveau des voiles était un geste tout ce qu’il y avait de plus déplacé. Et sous ses doigts calleux elle pouvait sentir la douceur ainsi que la fluidité d’un tissu dont elle ne pourrait jamais se parer, ce n’était pourtant pas la première fois qu’elle pouvait toucher ce genre d’étoffe. Les pirates qui manier le navire sur lequel
elle se trouvait avait un jour attaqué un bateau marchant dont la calle était pleine de ces rouleaux d’étoffes aux milles couleurs, ils les avaient tous rafler et avaient été aussi rapidement vendus au plus offrant sur les marchés des îles marchandes. Non ce n’était pas tant la texture des tissus de cette robe qui venait la troubler que le fait qu’ils semblaient autrement plus riches et raffinés une fois portées par une femme telle que son homologue devineresse. Elle qui dans toute son immense beauté, et dans sa grâce incommensurable, semblait prête à lui offrir tout ce qu’elle n’avait jamais eu : de la considération, et non pas pour son pouvoir ou les quelques conseils qu’elle aurait pu dispenser, mais tout simplement pour ce qu’elle était. Cela pouvait sembler ne serait-ce qu’un peu naïf que de penser qu’une parfaite étrangère pourrait la remercier pour trois fois rien, juste pour quelques instants d’attention et un minimum de confiance, mais pour Vigdis cela semblait terriblement important. Comme il était capital qu’elle obtienne certaine réponse au sujet du bien fondé de ses actes, et elle n’attendait pas moins de cette femme que quelques réponses à ce sujet.
Et les réponses fusèrent, bien plus nombreuses que ce à quoi elle s’attendait. Nulles réprimandes au sujet de ses quelques cachoteries, rien d’autre, lui semblait-il, que de la compassion et de la compréhension. C’était en quelque sorte particulièrement libérateur que d’entendre ça, et elle ne pouvait qu’accueillir la nouvelle par un soupir de soulagement, et un sourire à peine voilé par sa propre culpabilité. Oh, certes, si elle savait que ce qu’elle faisait n’était pas forcement bien vu de tous, et elle n’avait que peu de chance de se tromper en pensant que ceux qui ne possédaient pas le don de double-vue la maudiraient si ils savaient qu’elle faisait de la rétention d’informations. Cependant les années, et les quelques gifles que la vie lui avait offerte, lui avaient rapidement apprise que toutes les vérités n’étaient pas bonnes à dire, et qu’il y était souvent préférable de pieux mensonges. Quand bien même ils n’étaient pas pieux mieux valait tout simplement se taire.

Leurs histoires avaient des similitudes, et pourtant leurs destins avaient pris des directions radicalement opposées. Vigdis étaient devenue une esclave, elle n’avait jamais fréquenté les geôles, n’était devenue la putain de personne, et elle n’avait même jamais était assaillit par qui que ce soit. Tout cela, même s’ils n’étaient pas un modèle parfait en matière de sauveurs, c’était finalement grâce à cet équipage de pirates. Evidemment rien de tout cela n’était gratuit, et elle continuait à payer le prix de sa libération par le biais d’une captivité quelque peu plus agréable. Néanmoins être prisonnière restait un fardeau très lourd à porter, parfois si lourd qu’elle se perdait elle-même dans la contemplation d’un avenir qui ne serait surement jamais le sien, elle aimait à imaginer les protagonistes de ses visions se sortir des faux pas que leur tender le destin, elle aimait à penser que le destin pouvait aussi changer pour eux…
Alors ses mains toujours entremêlées dans les douces soieries se resserrèrent quelque peu, juste un peu, comme une tentative de communiquer ce désarroi qui venait de lui prendre l’estomac. Il n’était pas question de voir partir ces hommes… Tout du moins pas d’une façon aussi violente, elle ne souhaitait en aucun cas voir qui que ce soit se faire enfermer dans une quelconque prison. Elle avait assez entendu d’histoires au sujet des punitions qui attendaient les loups de mer tels que ceux qu’elle fréquentait à longueur de journée, et le moins que l’on puisse dire c’est que ça n’avait rien de réjouissant.

« Vous savez, aussi mauvais qu’ils puissent vous sembler l’être, ils ne le sont pas tant. Ce sont eux qui m’ont sauvé d’un avenir peu reluisant. Je sais qu’être devin sur un bateau pirate ce n’est pas le comble du bonheur, mais je ne manque de rien. »

Si ce n’était de liberté, mais ça, ça restait une notion abstraite, et il était difficile de penser que l’on puisse manque de quelque chose que l’on n’avait jamais réellement eut en sa possession. Lâchant le vêtement tout aussi promptement qu’elle l’avait attrapé auparavant, elle sembla vouloir s’excuser à l’aide d’une petite courbette tout ce qu’il y avait de plus maladroite. Vestiges d’une vie passée. Les yeux, désormais, avaient cessé d’admirer les traits de la devineresse pour à présent examiner le sol, si bien qu’elle ne vit pas la main de celle-ci venir lui caresser avec douceur la joue. Elle esquissa un mouvement recul comme l’aurait fait un animal craintif, juste un sursaut, avant de se reprendre en recouvrant un peu de son calme. Peut-être la voix charmante de son interlocutrice prit part dans ce retour au calme assez rapide, et surement cet envie d’en apprendre plus lui fit aussi recouvrir un peu de sa détermination.

« Dites m’en plus sur ce que vous avez vu ! »
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MessageSujet: Re: Sweet dreams are made of this | Vigdis    Sweet dreams are made of this | Vigdis  EmptyMar 01 Mai 2012, 12:08

De toutes les choses qui la laissaient sceptique, la reconnaissance de Vigdis envers ses geôliers était probablement la plus incompréhensible. Ne l'avaient-ils pas razziée ? Privée de sa liberté ? De son droit à diriger son destin. À décider si elle souhaitait mener sa vie et comment elle souhaitait la mener. Du point de vue de Lilith mourir de faim dans la rue était moins difficile que de voir son horizon se réduire à la vie sur un seul bâtiment. À l'esclavage. L'idée de sa propre valeur, de ses droits en tant qu'être humain avait toujours été profondément ancrée dans son être et elle ne comprenait comment son interlocutrice pouvait trouver des excuses à la captivité qu'elle subissait. Mais il était probable que son esprit ait été soumis à un endoctrinement constant de la part des pirates. Voire qu'elle eut assisté à des scènes qui lui prouvaient que sa situation n'était pas si terrible et que ses 'maîtres' n'étaient pas si mauvais. La compassion pour cet être qui aurait du être libre, fier de ce qu'il était revint envahir le cœur de la jeune femme mais encore une fois elle n'en montra rien. Comédienne jusqu'au bout des ongles, elle se contenta de hocher la tête, concédant qu'elle pouvait se tromper alors que son esprit était empli des sévices qu'elle réservait à chacun des Singuliers qui croyaient pouvoir s'arroger la propriété d'une personne qui leur était cent fois supérieure. Et elle ne parlait même pas des qualités humaines que paraissait présenter Vigdis et dont elle se savait personnellement complètement dépourvue. Cette particularité de son caractère était sans doute une conséquence de son pouvoir, ou du moins le pensait-elle. À vivre trop près de la mort, on devenait comme elle, on commençait à voir que la valeur intrinsèque de la vie ou d'un individu pesait bien peu devant l'inéluctabilité du trépas et de la pourriture qui nous attendait tous.

« Je veux bien croire qu'ils soient moins brutaux que la plupart de leurs congénères, très chère, mais permets-moi tout de même de ne pas cautionner leurs pratiques... L'esclavage des devins, les massacres aveugles dans le but de razzier les communautés, tout cela est tout à fait contre l'ordre naturel... » Elle ne mentionna pas les lois du roi. Elle se moquait bien des codes futiles des Hardansson. Ils chuteraient comme les autres et les marées de l'Histoire balaieraient leur nom. Les Héritiers se chargeraient de verser leurs os dans les profondeurs de Darya où ils disparaîtraient à tout jamais. Mais en attendant ce jour glorieux où le nom de Mynkor résonnerait sur toutes les terres, il s'agissait de faire profil bas et d'afficher une raisonnable normalité. « Mais puisque tu y tiens, puisque tu sembles avoir tant de reconnaissance pour eux, je tâcherais de réserver mon jugement à leur propos. » Qu'y avait-il de mieux pour manipuler un Devin qu'un autre Devin ? Leur nature commune impliquait qu'elles se comprennent instinctivement et le fait que Vigdis n'ait manifestement pas l'occasion de fréquenter régulièrement ses pairs donnait à Lilith un ascendant presque grisant. Pour autant, elle ne devait pas oublier qu'elles avaient le même âge et qu'elle ne devait en aucun cas se présenter comme un maître de conscience. Aussi ces concessions, de façade, étaient nécessaires pour maintenir un statu quo en attendant qu'elles puissent se parler plus librement. Attirer Vigdis chez les Héritiers prendraient du temps. Il faudrait déjà gagner son amitié et la jeune femme n'avait pas vu mieux pour cela que de lui insuffler un sentiment de reconnaissance. Elle reporta son attention sur la description de sa propre vision.

« Mes transes ne se produisent que lorsque je dors. Je n'y prends jamais part. Ce dont je suis assez reconnaissante compte tenu de leur contenu systématique. Voir un être agoniser est déjà suffisamment difficile à soutenir sans ressentir en prime les tourments de son trépas. En revanche, elles se concentrent généralement sur un individu en particulier pour des raisons que j'ignore. Je me suis tenue sur le pont de ce navire alors que la tempête qui couve. Le navire a rendu l'âme sous tes pieds, sous les pieds de l'équipage. Il n'y a rien que vous auriez pu faire pour l'éviter. Hormis rester à quai pour éviter son déchaînement. J'ai été précipitée en ta compagnie dans l'eau et je t'ai vue mourir en compagnie de tous les membres de cette triste compagnie. » Elle marqua une pause laissant le temps à son interlocutrice de digérer la notion. « Par chance, mes visions sont généralement accompagnées d'une bonne notion de la position actuelle des personnes qu'elles concernent. Voilà pourquoi je suis là aujourd'hui. » Elle ignorait si Vigdis avait déjà eu la prescience de son propre décès. Ses capacités de pythie n'étaient pas à ce point développées. Elle espérait néanmoins que la jeune femme lui confirmerait qu'elle n'avait pas reçu les mêmes messages. Sans quoi soit elle possédait un désir de mort, soit ses 'propriétaires' avaient décidé de passer outre son avertissement. Lilith n'avait pas l'intention de mêler les Héritiers à ce qu'elle considérait comme son projet personnel mais si le capitaine de ce navire ne se montrait pas suffisamment coopératif, ou manifestait l'intention de se saisir de sa personne, la jeune femme n'aurait pas le moindre remord à les faire massacrer. Il existait cependant peut-être d'autres solutions. Il faudrait y réfléchir lorsque le problème se poserait véritablement. Pour le moment, l'Héritière restait dans l'expectative. Elle finit par poser la question directement. « Avez-vous reçu le même genre d'avertissement ou cette prédiction est-elle totalement nouvelle pour vous ? » L'on verrait bien alors si Vigdis avait ignoré son destin en raison de son pouvoir, de sa volonté de s'affranchir de cette vallée de Larmes ou si les pirates étaient véritablement aussi stupide que Lilith le pensait plus ou moins ouvertement. Debout sur le port baigné par les embruns et l'atmosphère électrique qui précédait l'ouragan qu'elle avait pressenti, dont elles avaient peut-être toutes deux expérimenté la puissance, la devineresse attendait la réponse de sa compagne...
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MessageSujet: Re: Sweet dreams are made of this | Vigdis    Sweet dreams are made of this | Vigdis  EmptyMer 09 Mai 2012, 11:13

Sweet dreams are made of this | Vigdis  Sans_v11Nouvelle bourrasque de vent, celui-ci n’avait cessé de souffler et avait même vu son intensité doubler si ce n’était tripler. Juste une énième grosse bourrasque qui s’était engouffrée une nouvelle fois dans ses vêtements et lui avait arraché un frisson, non pas de froid mais d’appréhension. Retenant sa capuche qui ne cessait de menacer de s’effondrer sur ses épaules, dévoilant alors aux alentours qu’elle s’était trouvé de la compagnie. Les marins n’étaient pas très friands de sa présence sur le rafiot, mais ils n’appréciaient pas non plus de la voir se balader au travers des foules. C’était peut-être parce qu’ils craignaient qu’elle vienne à disparaitre, et cette crainte ne venait pas du fait qu’il tenait un tant soit peu à elle, mais simplement parce qu’ils craignaient assez leur capitaine pour ne pas souhaiter sa colère. Vigdis, quant à elle, n’avait jamais eu l’intention de fuir, mais elle ne pouvait ni connaître les intentions de tout le monde, ni contrôler les actes de tous ceux qu’elle pouvait rencontrer à chaque fois qu’ils se trouvaient à quai. Alors, afin de maintenir un peu de cette apparente tranquillité, et surtout pour éviter que les oreilles ne vienne trainer de leur côté, elle préférait garder son capuchon bien ancré sur son crâne, rabattant de temps en temps les quelques mèches blondes qui tentaient de s’échapper de leur prison de toile.
Cependant, toutes les capes du monde n’auraient pu cacher son anxiété. A quoi bon vouloir la cacher d’ailleurs ? Il était évident qu’apprendre l’imminence de sa mort n’avait rien d’agréable, si bien qu’elle regretta presque d’avoir demandé. Oui, d’en avoir demandé un peu plus au sujet de cette vision. Elle ne pouvait dès lors plus que maudire cette curiosité qui avait en quelque sorte gâché la surprise du grand final. Enfin, s’il y avait vraiment eu une surprise… Vigdis ne se souvenait pas d’avoir déjà entendu parler d’un quelconque devin qui avait pu prédire la date et les circonstances de sa propre mort. Néanmoins, elle avait vu les mortes, bleuis par le froids comme par leur fin désastreuse, boursouflés sous un soleil qui avait pris la place des lourds nuages noirs ; même si elle n’avait pas vu son corps flotter à la surface de l’eau en la douloureuse compagnie des autres corps sans vie, au milieu des débris de bois ou de cordages, elle ne pouvait nier l’évidence. Et si elle n’arrivait pas à faire changer d’avis le capitaine ainsi que son équipage, alors ils étaient purement et simplement condamnés au naufrage.

« Je l’ai vu aussi. J’ai rêvé de ce naufrage et de ses conséquences, et même si je n’y ai pas vu ma mort, nulle ne pourrait échapper à ce que j’ai vu. J’ai mené ce navire jusqu’à ce port, mais voilà, la tempête n’arrive pas, et l’esprit de l’équipage s’échauffe. Puis le capitaine ne souhaite pas rester plus longtemps à quai. »

Sa voix était marquée par les stigmates d’une peur certaine. Peur de la mort. Peur de l’inconnu. Inquiétude que trahissait sa voix, et le rythme de ses paroles, soudainement bien plus rapide, et surtout beaucoup plus haut perché. Un torrent d’émotions avait eu raison des quelques notions d’étiquettes qu’elle avait su préserver jusque-là. Gestes saccadées, et trémolo dans la voix, ne laissait nul doute quant au désemparèrent qui venait s’assaillir son cœur. Elle avait peur. Elle avait vu tant de personnes agir ainsi à l’annonce de leur funeste avenir, qu’elle s’en voulait de faire de même. C’était une réaction si indigne, si… Désespérante voir navrante, qu’elle préféra prendre une grande inspiration et baisser la tête plutôt que de laisser voir perler au bord de ses cils les larmes de son désespoir.

« J’ai osé… Oui, J’ai osé espérer que ma vision s’avèrerait fausse, et que le destin prendrait un autre chemin, mais voilà que vous m’annoncez avoir vu la même chose. Vous pouvez même prédire ma mort, alors c’est que le destin veut que les choses aillent en ce sens ?! Puisque je ne peux le changer par l’usage de mes propres forces, il ne me reste plus qu’à prier les dieux que les vents s’élèvent et que les flots s’abattent avant l’aube prochaine. »

Partir. S’éloigner en se reposant bien plus sur les dieux et les croyances en un destin bien meilleur c’était ce qu’elle avait trouvé de mieux à faire. Oh, pourtant, elle était loin d’être dupe, ni idiote au point de croire qu’une simple prière de dernières minutes suffirait à faire pencher la balance du bon côté… Néanmoins, elle gardait en elle cet étrange besoin de se recueillir, pour réfléchir un peu, oui, juste un peu à ce qu’elle pourrait bien faire. C’est bien là ce qu’elle souhaitait, mais sa détermination s’ébranla au moment où sur le bout de ses doigts, ainsi que sur ses joues, elle put sentir la finesse de quelque goutte de pluie.
Ça n’était pas grand-chose, à vrai dire c’était même un petit rien du tout que l’on aurait pu associer aux embruns, mais ce petit rien du tout incessant suffit à faire revenir le sourire sur le doux visage de Vigdis. Ce sourire qu’elle tenta de communiquer en se retournant prestement vers sa nouvelle rencontre qu’elle avait bien failli abandonner dans son inquiétude. Les paumes de mains tournées vers le ciel dont les nuages noirs barrés tout accès à la lumière, elle se mit à rire, comme l’aurait fait un fou découvrant la pluie.

« Suffisait-il de demander pour obtenir ?! »

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MessageSujet: Re: Sweet dreams are made of this | Vigdis    Sweet dreams are made of this | Vigdis  EmptyVen 11 Mai 2012, 22:35

A travers les couches arachnéennes du tissu vaporeux qu'elle portait Lilith pouvait sentir le vent se renforcer et la température descendre. Pourtant le froid ne semblait pas l'affecter. Et il y avait une bonne raison à cela. Vivre dans la rue dans le dénuement le plus total, l'avait grandement endurcie. Elle avait appris à limiter l'impact des douleurs physiques sur son âme. La faim, le froid, les coups pouvaient encore assaillir son corps mais la forteresse de son esprit leur restait inaccessible. Comme si son organisme avait voulu se faire l'écho de cette discipline mentale exceptionnelle sa peau laiteuse semblait marquer moins facilement les outrages de son environnement. Ou peut-être était-ce seulement qu'à force de privation, son être tout entier s'était habitué. Elle se tenait donc en face de Vigdis, droite comme un i, figée dans une attitude élégante, sa mise et sa posture lui prêtant des allures de statue alors que la journée avançait et que l'atmosphère fraîchissait. Ainsi donc l'équipage ne voulait pas attendre, préférant tenter le diable que d'écouter les prédictions de leur devin. La chose était acquise, ses rustres ne méritaient que son mépris. Elle envisagea un instant de faire intervenir ses propres forces mais peut-être que la persuasion lui garantirait un meilleur résultat. Ou la corruption si il le fallait vraiment. Elle envisagea un instant de renvoyer son garde du corps puis elle réalisa que ce ne serait certainement pas la meilleure chose à faire. L'emploi de la violence risquait de terroriser son interlocutrice et abandonner son escorte pour aller s'entretenir avec des pirates serait de la folie. Ces barbares singuliers ne manquerait pas de profiter de l'aubaine. Deux devineresses pour le prix d'une seule. Lilith n'était pas suffisamment stupide pour tenter sa chance avec ses seules capacités physiques. Elle se savait bien trop frêle pour opposer une résistance digne de ce nom à un homme du commun. Alors à tout un équipage de pirates assoiffés de sang et rompus aux combats déloyaux.

« Il nous faut dans ce cas tâcher de les convaincre. Peut-être ma vision suffira-t-elle à les persuader de ne pas se lancer bêtement sur les flots avec cette tempête qui couve... »

Elle ne voulait pas leur parler. Elle ne voulait pas les rencontrer. Mais si Mynkor ou la Fatalité exigeaient d'elle ce petit sacrifice pour s'assurer par la suite la reconnaissance de Vigdis et par là-même ouvrir une porte vers son amitié et sa confiance, elle le ferait. On ne pourrait pas dire qu'elle n'était pas entièrement dévouée à sa mission. Depuis qu'elle s'était découvert un but dans l'existence, la vie entière de Lilith en avait été transformée. Transcendée pour parler franchement. Elle y consacrait toute son attention, toute son énergie. Sauver les vies de gens qui pouvaient par la suite servir à réaliser les plans des Héritiers était une tâche à plein temps. Elle s'en acquittait pourtant sans rechigner et devait même avouer éprouver un certain sentiment d'accomplissement à chaque fois qu'elle sauvait une vie. Eut-elle été véritablement honnête qu'elle aurait avoué qu'elle se délectait également lorsque ses visions lui révélaient qu'un Singulier allait rencontrer une fin tragique dans des conditions souvent épouvantables. Elle espérait qu'un jour prochain elle verrait cet équipage mourir dans d'atroces souffrances après qu'elle eut détourné d'eux l'étrange fidélité que semblait leur porter Vigdis. Elle écouta sa complainte sans mot dire, ses yeux bleu fixés sur son visage, éprouvant les limites de son propre pouvoir. Elle aurait du évoquer cette affaire avec son mécène mais elle ne voulait pas le déranger pour une histoire qu'elle semblait à même de régler elle-même. Elle s'était trompée. Elle espérait simplement que la jeune femme debout en face d'elle ne paierait pas de sa vie le prix de son erreur.

Elle s'apprêtait à ajouter quelque chose lorsque le vent réussit finalement à s'engouffrer sous ses vêtements, soulevant les étoffes qui se gonflèrent comme les voiles d'un navire dans un froissement de soie. Le voile qui couvrait sa tête, charmante futilité qui n'avait d'autre destination que de sublimer d'un reflet bleuté ses cheveux couleur ébène, s'envola et elle dut le retenir d'un geste vif de prédateur révélant un instant qu'elle n'était pas juste l'inoffensive pythie qu'elle prétendait être. Elle s'apprêtait à le remettre en place lorsqu'une unique goutte d'eau épaisse et grasse, présage d'une tempête qui crevait enfin les nuages. Lilith sourit à la phrase innocente de Vigdis. Il était temps de se glisser un peu plus dans la peau d'une jeune femme apparemment candide qui était ravie de voir la vie d'une de ses compagnes épargnée. Le sentiment de victoire qu'elle s'apprêtait à exprimer n'était néanmoins pas feint. C'était son expression et les termes qu'elle utiliserait pour le décrire qui seraient faux. Un sourire éclaira son visage, ses yeux couleur de l'azur pétillant de bonheur. Elle prit les mains de son interlocutrice dans la parodie parfaitement exécutée d'un geste spontané, haussant la voix pour se faire entendre par dessus les bourrasques du vent qui ne cessaient de forcir alors que la houle montait à l'assaut de la ville.

« Il faut croire que le sort a seulement oeuvré pour que nous nous rencontrions, mon amie. J'avoue ne jamais avoir été aussi contente de découvrir qu'un ouragan va s'abattre sur le port. Mais nous devrions regagner un abri avant qu'il ne se déchaîne vraiment. Je ne tiens pas à rester sur les quais. Les vagues ne vont pas tarder à s'y abattre... Va retrouver ton équipage qu'ils puissent constater par eux-mêmes ce qu'ils ont failli affronter en s'entêtant de cette façon. Je vais aller retrouver mon mécène. Je ne voudrais pas qu'il s'inquiète en me sachant dehors par ce temps. Il risquerait d'envoyer ses gens me chercher et je ne veux pas exposer inutilement les domestiques à une telle tourmente. Mais il faut me promettre de me contacter si d'aventure tu as besoin de quoi que ce soit. En cas de besoin, fais porter un message à Lilith Dagan chez Grégor de Laffema. Je viendrai sans délai, je te le promets. Maintenant courrons nous mettre à l'abri avant de finir trempées au risque d'attraper la mort. Que les Dieux te soient favorables, Vigdis ! »
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MessageSujet: Re: Sweet dreams are made of this | Vigdis    Sweet dreams are made of this | Vigdis  EmptyMar 15 Mai 2012, 21:29

Sweet dreams are made of this | Vigdis  Sans_v11De gouttelettes en véritables gouttes d’eau les pavés se retrouvaient balayer par la pluie, chassant la crasses de la civilisation, la faisant dégouliner salement dans les rigoles des caniveaux improvisés. La pluie était arrivée après une longue attente, une attente qui avait semblé interminable, et qui finalement, en l’espace de quelques secondes s’était abattu sur la ville de Port Au Prince. Les vents violents ordonnant la direction des flots, les marchés commençant à se vider au profit des tavernes dont les âtres commençaient à s’activer. Et les étals de bois se vidaient progressivement, on se dépêchait de ranger les poissons dans des tonneaux de sel, et on abandonnait aussi vite les quelques pains de glaces que certains avaient réussis à se procurer. Le malheur des uns faisant le bonheur des autres.
Vigdis quant à elle était au comble du bonheur, la pluie ayant effacé toutes les craintes qu’elle avait pu avoir, et naïvement elle croyait que tous les problèmes étaient réglés. Oh, bien sûr elle ne doutait pas qu’à présent le capitaine jugerait avec bien plus d’attention sa proposition de rester encore quelques jours à quai. Ça n’était plus quelque chose de négociable, il n’était plus question de douter de ses visions, ni de remettre en cause le destin ; celui-ci semblait avoir pris sa décision et n’était dès lors plus décidé à revenir en arrière. Nulle éclaircie n’aurait pu traverser la couche épaisse de nuages noirs et menaçants qui avaient rempli le ciel, et l’horizon était chargé de ces nuages menaçant, énormes nuages d’eau et d’électricité dont on pouvait entrevoir les rideaux de pluies s’écouler en continue rythmé par le bruit sourd du tonnerre.
Elle aurait pu rester des heures sous cette pluie, les paumes comme les yeux levés vers le ciel, le visage baigner par cette eau qu’elle considérait comme salvatrice. Flanqué d’une allure de folle, à peine dérangée, elle aurait pu s’afficher ainsi oubliant le monde qui se trouvait autour d’elle si sa nouvelle connaissance ne lui avait pris les mains, la faisant dès lors redescendre sur terre. Et si elle eut du mal à défaire son regard du ciel obscur, elle ne le fit que pour se perdre dans le regard azuré de la devineresse, toute souriante, elle voulait communiquer sa joie à cette femme qui avait été si gentille, si compréhensive envers elle. Les oreilles sifflant sous le vent, la posture mal-assurée par les vents brutaux qui s’éveillait un peu plus à chaque instant, elle écoutant néanmoins avec attention les mots de Lilith comme pour les graver dans son esprit. Voulant garder en mémoire cette rencontre qu’elle considérait presque de l’ordre de l’extraordinaire.

« Loué soit le destin de vous avoir mis sur mon chemin, je prierais la déesse pour pouvoir vous revoir un jour et dans un jour bien meilleur que celui-ci. »

La voix tantôt cassée par le vent, elle se sentait presque incapable d’inspirer, et peut être même de respirer. Etait-ce dû au seul fait du vent, où y avait-il là-dedans quelques vicissitude dues à son état de grande euphorie ? Elle n’aurait su le dire, mais sa voix s’était tout de même élevé par-dessus le vent, elle avait réussi à prononcer ces quelques mots, espérant bien un jour pouvoir revoir cette devineresse que le destin avait su mettre sur son chemin au bon moment. Vigdis savait d’ailleurs, le pressentant au plus profond d’elle que leur prochaine rencontre aurait un bien meilleur goût, et que leur amitié à peine naissante prendrait certainement un chemin grandiose. Restait encore à tout construire.
Alors dans un ultime au revoir, comme une promesse, Vigdis se défit de la pression que Lilith exerçait sur ses mains, non par pour partir, non pas pour lui tourner le dos, mais juste pour lui offrir une accolade pleine de chaleur. Un gage de son amitié, peut-être un peu brutal par son coté inattendu, il pouvait tout aussi bien être mal prit par la devineresse, Vigdis ayant franchi les limites de son espace personnel en ayant l’air de s’en moquer éperdument. Ce fut une étreinte qui ne dura pas plus de quelques secondes, quelque chose qui se voulait communicatif, néanmoins Vigdis ne laissa pas le temps à son homologue de réagir, défaisant ses liens rapidement, les joues rougies par la gêne et par le froid qui commençait à se manifester.

« Prenez grand soin de vous jusqu’à notre prochaine rencontre, celle-ci sera, je le sens, sous de bien meilleurs auspices ! »

Puis, elle prit le parti de partir, ne souhaitant ni retenir Lilith, ni éterniser les au-revoir qui n’avaient pas lieu de trainer en longueur. Elle fit quelques pas, sentant la toile de sa robe se coller contre ses jambes, sentant l’eau s’écouler sur sa peau déjà détrempée, avant de se retourner une dernière fois, d’adresser un signe de la main en direction de Lilith, puis de se retourner et de se mettre à courir vers l’abri le plus proche. Courir aussi vite qu’elle le pouvait, retenant la capuche de son capuchon sans qu’il ne serve à rien, courir pour retrouver les siens… Ou tout du moins ceux qu’elle voyait comme étant les siens.
Il était à présent temps de rentrer, tout en gardant en mémoire le nom de Lilith Dagan, jusqu’à ce que le moment vienne où leurs chemins se recroiseraient.
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MessageSujet: Re: Sweet dreams are made of this | Vigdis    Sweet dreams are made of this | Vigdis  EmptySam 19 Mai 2012, 23:02

La pluie battante de la tempête avait beau gifler son visage et les éclairs illuminer le ciel de leurs soudaines lueurs, Lilith n’en avait cure. Trempée jusqu’aux os, elle remontait le chemin conduisant à la maison de son mécène avec l’air satisfait de la personne qui vient de réussir un tour de force. Une rafale, plus forte que les autres, lui arracha son voile qu’elle rattrapa d’un geste de la main presque négligent. Ce faisant, elle remarqua à peine la déchirure qui balafrait maintenant le tissu arachnéen. Il faudrait le faire réparer mais qu’importe. Le sacrifice d’un voile hors de prix était bien négligeable face à ce qu’elle avait accompli aujourd’hui au cours d’une seule discussion. On ne prenait pas tous les jours contact avec une autre prophétesse et on ne posait pas les jalons d’une conversion future avec un seul échange. Un sentiment d’accomplissement l’envahit alors qu’elle parcourait les pavés que l’eau lessivait, rendait glissant. Derrière elle, son escorte haletait tentant d’échapper à l’essentiel des intempéries en se réfugiant sous de futiles abris, perdant son temps et son énergie à lutter contre les éléments. Le bas de sa robe fut bientôt couvert de boue mais elle continua à avancer. Elle n’avait pas l’intention de perdre du temps en cherchant un refuge en attendant que cet ouragan s’arrête. Au regard de sa puissance, il durerait probablement toute la nuit si ce n’était plusieurs jours. La demeure de son bienfaiteur n’était plus qu’à quelques centaines de mètres et la Pythie avait vécu suffisamment longtemps dans la rue pour ne plus se formaliser d’une averse pour puissante qu’elle fut. Elle avait même fini par développer une étrange affection pour ses accès de colère de la nature, n’hésitant pas à passer des heures à sa fenêtre pour observer les déferlantes se ruer à l’assaut du port, sentir l’odeur d’ozone envahir l’air et la foudre frapper au hasard. Lilith adorait regarder la foudre… Elle n’aurait su dire ce qui la fascinait tant dans ce phénomène naturel mais elle ne manquait jamais l’occasion d’assister à un seul orage. Elle remontait donc cette avenue dans un grand silence, profitant du déchaînement de la tempête.

Elle s’engagea dans des avenues dont le caractère luxueux s’affirmait au fur et à mesure de sa progression. Les masures crasseuses du port laissèrent progressivement place à des demeures plus solides puis à des manoirs entourés de vastes étendues de verdure. Le mercenaire la suivait toujours visiblement résigné à être trempé jusqu’aux os. Nul doute que ce soir, il la maudirait de toute son âme, l’insulterait probablement. Mais elle n’en avait cure… Elle se contentait de continuer son chemin inlassablement, ses cheveux trempés formant deux rideaux de pures ténèbres qui ruisselaient littéralement sur ses épaules. Elle finit par arriver devant le portail de la demeure de son mécène. Lequel était perpétuellement gardé par deux hommes en armes qui se firent un devoir de lui ouvrir au plus vite. Elle se dirigea à grand pas vers le bâtiment d’habitation principal où une servante lui ouvrit, une expression catastrophée sur son visage. Dégoulinante d’eau, Lilith entra dans la maison. Adressant un regard de remerciement à la domestique qui se comportait vis-à-vis de sa personne avec la docilité d’un chien fidèle, attitude tout à fait louable bien qu’attendue, chez un Singulier, elle lui demanda de transmettre un message au maître de maison.

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